vendredi 31 décembre 2010

La visite éclair au Lac

Il y a trois ans, j'avais formulé le souhait de me rendre visiter mon ami Denis au Lac St-Jean, mais les circonstances n'ont pas favorisé cette rencontre : par deux fois, la météo s'est déchaînée et les routes ont été impraticables dans le temps de noël, pour le reste, un mélange d'imprévus et de conflits d'horaire ont fait en sorte que ce projet, pourtant simple, n'est pas pu se concrétiser auparavant.

La distance qui sépare St-Gédéon des Bergeronnes n'est pas particulièrement impressionnante : il n'y a que 200 kilomètres de route qui nous séparent, mais la route en tant que telle est assez imprévisible : la réserve de la Sainte-Marguerite constitue un parcours sinueux, à travers une vallée à la température changeante. Par la suite, il faut traverser la ville de Saguenay, puis poursuivre la route par des chemins de campagne, où le vent peut s'avérer un obstacle pour le conducteur habitué aux villes.

La première partie du voyage relaxe le voyageur, tant les paysages sont parsemés de collines, de rivières, de chutes de glace et de vallées où le soleil se plait à créer des contrastes d'ombres et de lumières. La vallée de Sainte-Marguerite vaut son pesant d'or, car on s'y sent en communion avec la nature, dans cette contrée qu'on contemple à travers le chemin sinueux qui part de Sacré-Coeur pour se rendre à (feu) Chicoutimi, en passant par le village enchanteur de Sainte-Rose-du-Nord.

Puis, peu à peu, en passant par St-Fulgence, on entre dans la nouvelle ville de Saguenay, qui est un peu difficile à traverser, quand on ne s’y connait pas. Par chance, j’avais déjà eu l’occasion de faire du repérage, mon oncle nous ayant promenés en ville antérieurement. Un soleil de plomb terrassait les automobilistes du boulevard Talbot, qui avançait à la même vitesse que les automobilistes montréalais sur Décarie à l’heure de pointe.

La dernière étape de la route étant de se rendre à St-Gédéon, il suffisait de suivre une route de campagne, comme il en existe des centaines au Québec. J’ai par contre été surpris de rencontrer des villages d’une route, c’est-à-dire des habitations agglutinées autour de la 170.

Après un périple de trois heures, je me rends à l’adresse indiquée par mon ami Denis, authentique gars du Lac. Il m’accueille (un peu en retard), visiblement fatigué par les fêtes, son travail et sa rocambolesque vie sociale. En rattrapant quelques mois avec quelques bières, je me détends un peu de la longue route que j’ai faite. Nous sommes allés souper chez Gooffy, à Alma, pour prendre un repas traditionnel du Lac : la poutine à la sauce BBQ avec du Red Champagne. Après cette entrée en matière, nous sommes allés boire une bière au Crapaud, bar bien connu de la région. Malheureusement pour moi, c’était vide et j’ai eu un peu de difficulté à croire qu’on s’y bouscule les soirs d’affluence. Finalement, nous avons terminé la soirée en dégustant des bières à la microbrasserie de St-Gédéon, un endroit fort sympathique. Au milieu de nulle part, on trouve une petite place bien sympathique, où l’air est empli de houblon, de musique québécoise variée et où s’entrechoque un langage assorti d’un accent fort cordial. C’est en prenant une plaquette de dégustation que je découvre quatre sortes de bière. J’ai eu un coup de cœur pour la tante tricotante, la dernière et la plus forte de ces dernières. Voyant que mon ami commençait à canter, nous sommes retournés chez lui, question de nous coucher pour être prêts pour la pêche à la loche du lendemain.

Au petit matin (lire à 8h00, durant une période de congé), nous nous sommes levés dans une forme olympienne (un bon 20 minutes a été nécessaire pour nous extirper de nos lits respectifs) pour nous rendre chez le père de Denis, qui a été assez bon pour nous inviter à déjeuner. Puis, il me fallait prendre des habits qui me tiennent au chaud sur le Lac, alors j’ai eu droit à un genre de changement de style assez exceptionnel : mon manteau Kanuk ne suffirait pas à la tâche : j’ai revêtu un manteau d’armée, avec des salopettes assorties, des gants de cuir, des bottes doublées et même triplées, un cache-cou et un casque de motoneige. Il est à noter que je suis épouvantable pour attacher des casques. Lorsque je suis allé au centre Bell pour patiner avec les Canadiens, j’ai voulu donner l’exemple et j’ai apporté un casque… mais on a rapidement vu que je n’ai jamais revêtu un casque du genre! Bref, j’ai dû expliquer que j’étais un « montréalais un peu épais » et que je n’avais aucune idée comment je devais attacher la courroie.

Nous avons par la suite pris les motoneiges pour nous amener au milieu du Lac St-Jean. Voilà une quinzaine d’années que je n’avais pas monté sur l’une d’elles et ce fut là un moment très agréable. L’idée d’aller sur le Lac, un genre de désert de glace, me surprenait, moi qui ne connaissais rien de la pêche sur glace. Mais nous nous sommes rendus près des « trappes », un trou identifié par une branche d’arbre, puis nous avons piqué la glace. Attachée à une branche transversale, une corde d’une dizaine de mètres était attachée à une autre branche de bois, de 3 mètres. Cette dernière contenait les hameçons (des morceaux d’éperlans) et les loches qui ont bien voulu demeurer prises. Mon ami jubilait, il avait attrapé de gros poissons (dont un de 2,5kg).

En conduisant vers son deuxième trou, j’étais aux commandes de la motoneige et j’ai connu un accident heureusement peu fâcheux : en voulant tourner sur la glace, l’arrière de la motoneige dérape et les skis avant se placent sur la neige, ce qui donne un violent contrecoup, projetant mon ami sur la glace et mon rentrant le volant profondément dans les côtes. Comme nous roulions à basse vitesse, les conséquences sont relativement peu importantes, mais j’en ai été quitte pour une bonne explication, néophyte que je suis. Voilà une expérience qui fut bien marquante, d’autant plus que les « rots » de la glace sont assez uniques (il s’agit de l’air qui s’enfuit par les trous d’eau, ce qui donne un son rauque, comme si le lac rotait).

J’ai également eu l’occasion de croiser la grand-mère paternelle de mon ami, qui allait relever ses hameçons et qui semblait bien dynamique, même à sa 77e année. Nous sommes retournés et puis c’était la fin. J’ai quitté le Lac en me disant que j’avais eu la chance de vivre une belle expérience.

lundi 6 décembre 2010

Sous la neige

Montréal revêt son premier duvet de neige et la tempête ralentit le rythme effréné de la vie citadine. Aujourd’hui, j’ai comme envie de contempler le spectacle des lumières qui enjolivent le spectacle de la première rafale de neige de l’année. C’est là une belle occasion de profiter d’une marche pour se réconcilier avec le froid et l’hiver.

Je dois admettre avoir été préoccupé par autre chose et ne pas tout de suite avoir pu réaliser la beauté de la tempête, son calme apaisant et son charme, qui se dessine derrière les lumières qui nous permettent d’apprécier la poudrerie. Au son d’un carillon qui s’était pris dans le vent, j’ai eu l’occasion de m’émerveiller d’un bonheur fort simple, qui n’est pas sans rappeler l’Inukshuk, ce monticule de pierres utilisé par les peuples inuit et yupik pour guider la route des voyageurs. Cela est d’ailleurs un symbole pour lequel l’Ancre des Jeunes, l’organisme communautaire pour qui j’œuvre, avait donné la mention suivante : « Je suis passé avant toi. Tu es sur la bonne voie, aie confiance en toi et continue ta route ». Bref, un moment de calme dans le tumulte de la vie, qui nous embarque trop souvent à revers dans un tourbillon sans fin.

Je chausserai donc mes bottes dorénavant, en foulant du pied cette neige qui a, l’espace d’un instant, apaisé un spleen. Comme diraient les Beatles : « Let it be ».

lundi 22 novembre 2010

Une pointe de pizza

Chers lecteurs,

Voilà bien longtemps que je me suis extasié bruyamment par rapport à un met culinaire de ma conception, mais ma dernière pizza mérite bien une petite parenthèse. Rien de bien compliqué d’ailleurs, une pâte maison, du thym frais, de la sauce tomate, des morceaux de Coppa bien relevés, un peu d’ail, des poivrons, des champignons, des courgettes ainsi que des oignons rouges, le tout recouvert d’une généreuse couche de gruyère et d’édam. D’une simplicité enfantine, le plus gros défi demeure de laver la vaisselle après avoir rangé les ingrédients. Cependant, cela n’enlève rien au palais, qui prend plaisir à s’extasier de cette saveur riche, des délicieux effluves qui s’échappent du four, des fromages qui s’harmonisent, des oignons légèrement caramélisés qui offrent un parfum subtilement sucré, des poivrons bien revenus qui adoucissent les élans plus corsés de la Coppa. Avec les champignons et les courgettes revenues au beurre, la quintessence culinaire s’offre au palais, dans une forme complexe, harmonieuse et d’un équilibre symbiotique parfait. De quoi faire baver le gastronome en vous!

mercredi 17 novembre 2010

Ma visite chez Aubut

Vous souvenez-vous, dans votre jeunesse, lorsque vos parents vous amenaient dans un grand magasin de jouets, dans une confiserie ou tout simplement dans prendre un cornet de crème laitier au bar laitier du coin? Il me vient à l’esprit des sourires sur la bouche des petites frimousses et des yeux gros comme des deux dollars! Aujourd’hui, dans le cadre des mes fonctions de professeur de cuisine, j’ai eu l’occasion d’aller visiter un entrepôt où s’approvisionne les restaurateurs et il me semblait retrouver, l’espace d’un instant, cette féerie de mon enfance.

Premièrement, tout est surdimensionné : on vend de la margarine à la chaudière, en format 5 kg, on peut acheter une conserve de 9,7 kg de choucroute et le tout à des prix franchement en deçà de ce qu’on paye dans un supermarché. D’ailleurs, on y trouve de tout : des batteries de cuisine aux couteaux de spécialité, en passant par les planches à découper jusqu’à l’ensemble des produits de nettoyage. Vous y aviez pensé, vous, à acheter du vin de cuisson? Vous savez, on paye une fortune à la SAQ pour acheter un vin qui finira dans la votre assiette, alors que là-bas, vous pouvez en acheter 20 litres pour 22 dollars! Vous êtes tannés de vous fatiguer à couper de l’ail… et bien pourquoi ne pas l’acheter en morceaux… au kilo? Vous aimez les frites, la boite de six paquets de 2,27 kg se détaille à 18 dollars.

J’ai été fasciné parce que je réalise que le prix des denrées alimentaires semble varier beaucoup plus en fonction du volume écoulé que simplement en fonction de l’offre et de la demande. Tous ces contenants gigantesques, que je m’imaginais placer dans une cuisine imaginaire, semblaient me promettre d’agréables mélanges et de nouvelles possibilités culinaires. Il y a tous ces produits que je n’ai pas eu le temps de voir et que j’aurais aimé déguster. Bref, j’y retournerai, c’est certain!

Je pense que la démesure et la variété (il y a un inventaire de 240 pages de produits sur leur site Web) m’attire comme un aimant électronique. Je vous invite à vous faire une tête en consultant leur site Web.

dimanche 7 novembre 2010

Incendies

Pour une deuxième chronique de suite, je vais vous reparler de cinéma, cette fois à propos d’un autre film québécois : Incendies. Avertissement : cœurs sensibles s’abstenir. Ce film est d’une dureté et d’une violence qui est à la limite de l’insoutenable. Sans tomber dans la caricature, Denis Villeneuve a su rendre, dans une atmosphère sombre et lugubre, la rage de vivre, envers et malgré tout.

L’intrigue est centrée sur l’histoire de Nawal Marwan, qui est morte lorsque le film commence. Ses deux enfants, Simon et Jeanne, rencontrent l’employeur de leur mère, le notaire Lebel (excellent Rémy Girard), qui est également l’exécuteur testamentaire. Leur mère leur demande de trouver leur frère et leur père, sans autres indices que son vieux passeport. D’ailleurs, le pays d’origine des Marwan est fictif, c’est un mixte entre le Liban, la Syrie et la Jordanie.

Le film se divise en deux fenêtres : d’une part, on voit la vie de Nawal (Lubna Azabal) avant qu’elle arrive au Québec. De l’autre, on voit Jeanne (Mélissa Desormeaux-Poulin), puis Simon (Maxim Gaudette), qui sont sur les traces de leur mère, dans son pays d’origine. Les transitions sont superbes, les prises de vue spectaculaires, la symbolique omniprésente et présentée avec images saisissantes. On nous ramène constamment à quatre dimensions : le feu (le titre est bien choisi), l’eau (piscine), la terre et l’air (présentés conjointement par les paysages dévastés, les villes et villages ainsi que le coin lugubre du quartier St-Laurent, à côté de la 15, où il semble toujours régner une atmosphère moribonde.

Le jeu de Lubna Azabal avoisine la perfection. Même si le scénario lui donne probablement le rôle le plus difficile à interpréter, elle demeure crédible d’un bout à l’autre de l’histoire. Avec émotion, elle nous transporte dans les multiples facettes de son existence, une réalité sans pitié, dépeinte grâce à l’exceptionnelle résilience de son personnage. On peut reprocher à Mélissa Desormeaux-Poulin plusieurs dialogues rarement convaincants et à Maxim Gaudette son insipidité ainsi qu’un jeu manquant de réalisme. Les deux jeunes acteurs brillent peu, même si Jeanne est mieux incarnée que son frère. Rémy Girard s’en tire pour une fois avec un rôle intelligent, qui illustre bien la polyvalence de l’acteur. Sa performance est de la trempe de celle du Déclin de l’empire américain. Les rôles de soutien sont également solides et le jeu est très concluant. Du côté de l’image, il y a une inconstance par rapport au teint de la peau de Jeanne : au Québec, sa peau basanée lui donne un air arabe, alors qu’une fois rendue de l’autre côté de l’Océan, elle semble plus québécoise que nature (teint blanc laiteux).

La conclusion du film, percutante à souhait, nous fait ressentir un malaise sans nom. Le film a vraiment atteint la limite de l’insoutenable. Dans le cinéma, l’air me semblait froid, mais j’ignorais si c’était la température extérieure ou celle de mon âme qui me saisissait autant. Frappé de stupeur après la conclusion, j’ai été incapable de discuter du film sur-le-champ. Denis Villeneuve a réussi un coup de maître et signe un chef-d'œuvre inspiré, tragique, mais d’une grande beauté. Quant à moi, j’en ai été tétanisé!

samedi 30 octobre 2010

10 ½

Je crois qu’il s’agit d’une première, je n’ai pas souvenance d’avoir déjà écrit un billet concernant un film. En effet, en termes de cinéma, ma culture ne soutient aucune comparaison : le 7e art est pour moi, un peu comme disait Churchill de l’URSS : un mystère enrobé d’une énigme. Laissez-moi cependant vous offrir mon interprétation du dernier film de Daniel Grou (dit Podz), qui traite d’un sujet très en lien avec ma vie professionnelle : la dure réalité des éducateurs (et la perspective d’un enfant bien mal avec lui-même).

La première chose qui m’a frappé, c’est la dureté du début. Étant un peu blindé, je n’ai pas particulièrement réagi à cette réalité, mais elle est bien réelle et elle est un écho fidèle d’un jeune abandonné à lui-même. Tout au long du film, le silence, pesant, le manque de dialogues et l’atmosphère étouffante de la garde fermée nous imprègnent d’un malaise constant, d’un genre d’enfer pour claustrophobe, surtout dans la tête! Lorsqu’on voit à quel point les jeunes sont impitoyables entre eux, cela nous ramène à la cruauté de l’enfance, particulièrement prépondérante dans les Centres Jeunesses.

La relation dépeinte dans le film, entre l’éducateur et le jeune Tommy, était très crédible. Claude Legault est crédible dans son rôle, quoiqu’il dépeigne un portrait assez idyllique de l’éducateur modèle. Pour ce qui est de Tommy, il est un peu plus inconstant et on décroche parfois lors des dialogues avec son père. Par contre, lors de ses crises, on se croirait sur le plancher. Une toute petite scène est venue me chercher avec autant de violence que le film tout entier : l’éducateur dit à Tommy qu’il a bien été aujourd’hui et qu’il va devoir lui trouver une récompense. Aussitôt, ce dernier se met à manger avec ses doigts et il saborde ce succès qu’il allait vivre. Une réalité aussi horrible à voir qu’à constater.

Je vous recommande donc d’aller voir ce film que j’ai beaucoup apprécié. Les plans de caméra sont très intéressants et une atmosphère particulière, lourde, intensément chargée en émotions. Il s’en dégage un peu de ce qu’on peut vivre dans la réalité de l’intervention et le scénario est convaincant.

Au plaisir d’entendre vos commentaires!

lundi 25 octobre 2010

L’affaire est dans le sac

En sortant de la bouche de métro, il marche d’un pas rapide, il a l’air pressé par le temps. Il longe plusieurs rues. En attendant à la lumière, il tape du pied. Il reprend son chemin sans s’arrêter, jusqu’au moment où il arrive à destination et ouvre une grande porte. Une fois à l’intérieur, il se fait introduire à Rodolfo, le chef qui l’instruira sur l’art des aumônières au saumon, des baluchons poulet et chorizo et des bananes flambées au rhum. Ce sera un cours très intime, seuls deux autres convives seront de la partie, deux femmes tout juste retraitées, qui viennent stimuler leur plaisir à cuisiner.

Rodolfo est diplômé de l’école Cordon Bleu à Paris (2007). Ce Brésilien d’origine a travaillé ici et là et il est arrivé au Québec dernièrement. Ayant œuvré dans quelques établissements gastronomiques du centre-ville de Montréal, il a réalisé qu’il désirait davantage partager sa passion culinaire par l’entremise de l’enseignement. Ses yeux pétillants révèlent une âme éprise d’une passion insatiable, vibrante et contagieuse pour son domaine de prédilection.

Le nouveau venu s’installe timidement à sa place de travail, où sont installés deux couteaux : l’un de chef et l’autre d’office. Après une brève poignée de main avec ses convives sexagénaires, nommées Marjolaine et Josée, Rodolfo lui offre la place derrière le poêle à induction pour commencer le caramel au beurre salé. Assez rapidement, le sucre commence à fondre et il est temps de rajouter le beurre, puis la crème 35 %. Le temps d’aromatiser le tout avec un mélange broyé de poivre blanc, de gingembre, de cannelle et de clous de girofle, puis le principal intéressé dépose la casserole à l’extérieur de la plaque de cuisson.

L’homme, tantôt stressé et tendu, est maintenant à son aise. Il coupe, avec ses comparses, les légumes d’accompagnement. En suivant les conseils du chef, il arbore un grand sourire béat. Josée saisit rapidement les blocs de saumon à la poêle, tous justes assaisonnés de sel et de poivre fraichement moulu. Il salive en regardant la scène, au plus profond de lui, il se régale déjà des yeux. Il jubile, son système dopaminergique fonctionne à plein régime. Il apprend enfin un signe avant-coureur d’un saumon raté : s’il se dégage de l’albumine, le poisson est alors trop cuit. Avec la pâte phyllo, ses comparses et lui emballent chacun un morceau de saumon. Subséquemment, ils bouclent tous leur aumônière avec une échalote française passée à l’eau chaude. La préparation repose pendant que l’on termine les légumes (carotte, zucchinis, échalote française, poivron rouge, oignon blanc, ail). On fait bien sûr cuire les carottes à part, pour les rajouter à la toute fin. L’huile de canola est utilisée à la cuisson : elle se distingue des autres, car elle ne contient pas d’aspérités qui se dégraderont à la cuisson, comme avec l’huile d’olive par exemple. Pour aromatiser le tout, une pincée de graines de coriandre moulue, du curcuma, du persil et un fond de vin blanc. Les carottes viennent rejoindre la mixture, puis, à la toute fin, la main de Rodolfo ajoute nonchalamment de l’huile d’olive, une fois le plat retiré du feu.

Les aumônières au four, on dresse les assiettes à risotto pour garnir le fond de légumes chauds et croquant tout en décorant l’assiette avec une réduction de vinaigre balsamique. On pose l’aumônière au-dessus des légumes et on le garnit avec des pousses de moutarde.

Il s’assoit à la table avec ses nouveaux convives, ils commandent ensemble une bouteille de Pinot Noir, l’homme s’installe à son aise, il se sent bien. Ensemble, ils portent un toast à la santé, se souhaitent mutuellement bon appétit et attaquent l’entrée sans autre mesure. Chaque bouchée fond dans la bouche, le saumon se soutient bien dans la pâte phyllo et les légumes, encore assez croquants, sont juste assez relevés pour que leur saveur naturelle soit rehaussée par les épices utilisées.

De retour à la cuisine, armés de leur verre de vin, ils s’attaquent au second plat, un baluchon au poulet et à la saucisse chorizo, avec une salade aux concombres, aux oignons rouges, nappée d’une vinaigrette à la moutarde de Dijon, à l’huile d’olive, au miel et au vinaigre de citron. Très simple, la pâte Brick, badigeonnée des deux côtés d’une bonne couche de beurre fondu, sert à marier le poulet préalablement doré (des hauts de cuisse) au chorizo. Plus ferme que la pâte phyllo, on peut s’amuser à la triturer dans toutes les formes, tant elle est polyvalente et malléable. Encore une fois, au four, le temps de brunir cette pâte, puis dans l’assiette, garnie de la salade et d’un bouquet de pousses de moutarde.

De nouveau à table, avec Rodolfo cette fois, ils s’amusent ferme. Le chorizo, bien qu’assez fort, ne jure pas avec le reste et, au contraire, rehausse le poulet. Le Pinot Noir, dont on ne tarira jamais d’éloges, est assez fort pour soutenir cet accord, bien qu’on sente qu’il s’agit de la limite entre le fin alliage de robustesse à la délicatesse par rapport à l’accord du plat qu’il doit soutenir. Le fait qu’il ait passé l’oignon rouge à la mandoline fait en sorte que l’homme, habitué à conspuer les amateurs d’oignon, mange sa salade avec cœur, commettant même l’hérésie de s’en servir une deuxième portion, bien entendu accompagnée d’un autre baluchon (mais quel goinfre)!

Puis, pour la finale, nos trois protagonistes, accompagnés de leur chef, se rendent une dernière fois à la cuisine, question de préparer le dessert. Le chef le désigne encore, pour qu’il fasse flamber les bananes au rhum. L’homme, tout sourire, s’exécute avec un malin plaisir, d’autant plus que les flammes atteignent presque un mètre de hauteur. Il éteint le feu en remettant la poêle sur le rond et cette dernière meurt tranquillement dans un étrange silence. Le temps de mettre quelques tranches de brioche à cuire (au beurre bien entendu) et de garnir généreusement nos assiettes de crème glacée, ils retournent une ultime fois à la cuisine, pour déguster le fruit de leur labeur. Rodolfo parle beaucoup de son amour de la gastronomie et ses paroles semblent être, pour ses convives, aussi délicieuses que le désert qu’ils consomment et que le café que leur hôte leur a si gentiment préparé. L’homme est repu, Marjolaine et Josée le sont également, ils saluent chacun leur tour le chef, à qui chacun d’entre eux laissera un généreux pourboire pour être parti plus d’une heure après la fin des activités. Ils rentreront tous ensembles, souriants, laissant derrière eux un Rodolfo ému et ayant visiblement passé une bonne soirée.

mercredi 20 octobre 2010

Le droit et le coup double : éduquer ou réprimer?

Après la lecture d’un article portant sur le « coup double », un sandwich dangereux de PFK, j’ai eu l’impression de recevoir un direct en pleine face : l’Ontario songeait à interdire ce sandwich… la santé publique aurait donc préséance sur le droit individuel?

Ce « coup double », considéré comme étant monstrueux parce qu’il contient 540 calories, 30g de gras et 1,74 g de sodium, n’a rien d’extraordinairement décadent, si on le compare à 100g de Tostitos (520 calories, 26 g de gras, 0,4 g de sodium) accompagné de 100 mL de salsa du marché (qui contient notamment 0,9 g de sodium). Je pense également à mes pierogis, que j’ai eu l’indécence de faire revenir dans du beurre et de servir avec de la crème sure. Que dire alors des restaurants haut de gamme, qui servent des frites cuites dans la graisse, des sauces à la crème 35% et des pâtisseries purs beurre (ils s’en vantent). Doit-on interdire le Tripple Whopper, avec ses 1250 calories, le trio de croquettes de poulet chez McDonald (516 calories pour dix morceaux de poulets, 560 calories pour les frites de grand format et 230 calories pour un grand thé glacé) et le gâteau Saint-Honoré à 1131 calories par portion? Que dire de nos copieux repas du temps des fêtes, de cabane à sucre et de tous autres festins qui ponctuent les événements de notre vie? La direction de la santé publique devrait-elle faire une descente chez moi pour jeter mon saindoux?

Que je sache, l’alcool et les jeux de hasard détruisent beaucoup plus de vies que la consommation de nourriture grasse. Interdit-on pour autant certains produits qui pourraient être plus nocifs que d’autres? Est-ce qu’on se gêne pour faire de la publicité sur ces derniers (bien sûr que non, ce sont des sociétés d’État)? L’état s’est mis dans la tête de régler le cas du tabagisme : aucune publicité, interdiction de fumer dans les lieux publics, messages dissuasifs sur les emballages et maintenant, les paquets doivent être cachés sous des présentoirs. J’en suis à me questionner à savoir s’il est mieux vu au Québec de fumer un joint qu’une cigarette? Il y a cependant un problème, la nourriture-minute constitue également un problème de santé publique ayant pris des proportions alarmantes. Il est même possible que les générations futures vivent moins longtemps que leurs parents. Je pose la question : l’état devrait-il taxer la malbouffe comme il le fait avec les produits du tabac? Si nous poussons dans cette logique, les gens qui ne font pas de sport devraient-ils payer une taxe d’inertie?

En toute sincérité, je ne sais pas que penser par rapport à la question de choix, sinon que la situation actuelle mérite d’être corrigée. Je ne suis pas tout à fait d’accord avec le principe d’un état totalitaire, qui me dicte ce qui est bon pour moi… il parait d’ailleurs que les Nord-Coréens, les Cubains, les Chinois, les Laotiens et les Vietnamiens en font les frais (sans parler des Birmans, des afghans, des Biélorusses et j’en passe). Par ailleurs, le libre-choix implique d’être correctement informé sur les produits qu’on nous offre et de pouvoir comprendre ces informations. Quand on sait que 38 % des Québécois souffrent d’une forme d’analphabétisme, on peut être en droit de s’inquiéter. L’état actuel des choses me suggère qu’une campagne de sensibilisation pourrait être salutaire.

Je souhaiterais vous entendre et j’attends avec impatience vos opinions.

lundi 9 août 2010

La politesse élémentaire

Je prends un instant de réflexion pour toucher une question qui m’est chère : la politesse. Au début de notre XXIe siècle, je trouve que les formules de politesse et les conventions sociales s’effacent rapidement pour remplacer un monde ayant adopté une culture de « fast food ». J’en veux pour indicateur les gens que je fréquente, qui, malgré toutes leurs qualités, m’exaspèrent parfois au-delà des mots en étant parfois carrément déplacés dans leur manière d’agir. J’essaye d’être le plus courtois possible lorsque je dois m’adresser à quelqu’un, car il s’agit pour moi d’une marque de respect que l’on prête à l’interlocuteur qui nous fait bénéficier de sa présence. Évidemment, je ne prétends pas être un modèle à suivre à ce chapitre.

J’aimerais prendre un moment pour vous faire part des petites choses de la vie qui me font rager intérieurement, mais pour lesquelles il n’est pas de bon aloi de critiquer vertement :

• Le maudit cellulaire : étant détenteur de cette invention diabolique, je tente de canaliser mes frustrations lorsque la vibration de cette machine vient s’interposer dans ma communication avec autrui. Je ne connais rien de plus dérangeant que d’être obligé de couper ma conversation avec une personne pour qu’elle réponde à son damné téléphone portable, sans pour autant avoir la décence de s’en excuser. Je crois que la politesse la plus élémentaire commande de demander à l’autre personne : « excuse-moi, est-ce que tu permets que je réponde? », s’il ne s’agit pas d’un contexte professionnel. Combien de fois ais-je dû aviser mon vis-à-vis lors d’un souper au restaurant que la prochaine fois que sa sonnerie retentira, je quitterai l’endroit, puisqu’il semble avoir plus envie de traiter avec une personne qui n’est pas physiquement avec nous. Même si je considère m’être calmé par rapport à mes réactions extrêmes d’un passé pas si lointain, il n’en demeure pas moins que le cellulaire est un irritant majeur de notre monde moderne.
• Les communications électroniques sans les formalités : est-ce qu’il est si difficile d’écrire une formule de salutation personnalisée avant d’entrer dans le vif d’un sujet? Sans être tatillon, est-ce qu’écrire « salut untel», « bonjour » ou plus informellement « coucou » s’avère une tâche difficile à exécuter? Peut-on, avant de communiquer une nouvelle, prendre le temps de s’informer de l’état de son interlocuteur? Le fait de demander « comment vas-tu » est-il un obstacle à la communication efficiente? Lorsqu’on écrit un courriel personnel, l’ouverture de la fin : (« au plaisir de te voir bientôt », « en attendant de tes nouvelles », « salutations », etc.) est-elle si longue à rédiger? De plus, qu’en est-il de simplement signer son courriel, lorsque la plupart du temps, nous avons tous une signature électronique?
• De manière générale, lors des entretiens téléphoniques, la norme des lieux urbains nord-américains semble être la suivante :
1. Phrase d’ouverture (« Oui, bonjour!)
2. Demande (« Bonjour, pourrais-je parler à untel »)
3. Réponse à la demande (« lui-même », « un instant, je vais voir s’il est disponible »)
4. Conversation avec la personne à rejoindre
5. Formule de salutation (« au revoir », « salut », « à bientôt »)

Il me semble que lors de mes derniers appels, à peu près toutes ces règles de bienséance ont été transgressées. Je me demande parfois s’il s’agit d’une carence d’habiletés sociales au point de vue sociétale ou si c’est moi qui vit avec un standard de politesse d’un autre siècle. Des fois, je prends même plaisir à parler à une secrétaire ou à un préposé quelconque parce qu’il est tenu de respecter ces standards et que je trouve d’emblée la conversation plus respectueuse.

Dans ma famille, ces normes sont importantes et quelque soit le mode de communication, le respect de l’interlocuteur demeure une priorité. Je ne prétends pas détenir le secret de la bienséance (il s’en faut de beaucoup) : j’ai notamment tendance à hausser le ton lors des échanges musclés, je coupe souvent mes interlocuteurs et je suis bien obligé de me mordre la langue à maintes reprises pour éviter de devenir un haut-parleur. Cependant, je crois comprendre l’usage des formalités est un moyen efficace pour clarifier les échanges que nous entretenons avec notre entourage.

Il me semble que je me suis souvent tu lorsque je me suis senti frustré par rapport à cet enjeu. Mon blogue me semble être un endroit tout indiqué pour échanger notre vision de la politesse, des normes sociales et des bonnes manières. J’aimerais bien avoir le point de vue de mes lecteurs à cet égard, si vous êtes assez bons pour bien vouloir l’écrire.

Au plaisir de vous lire!

mardi 3 août 2010

Le Canada et la Corée du Nord, même démocratie

L’irresponsabilité, l’incompétence et l’imbécilité indéniable des policiers de Toronto ont tôt fait de nous garantir autant de libertés que les victimes des camps de concentration nord-coréens. Le Canada est un pays totalitaire, gouverné par un premier ministre violent et sanguinaire à l’égard de ses concitoyens. Si certaines revendications des manifestants du G20 peuvent sembler pour le moins discutables, leur arrestation massive, le profilage racial systématique des Québécois et la xénophobie des policiers anglophones couvrent de honte le « plus meilleur pays du monde » et la capitale ontarienne, qui n’est rien d’autre qu’une prison à ciel ouvert. Il s’agit d’un autre argument en faveur de la souveraineté, puisqu’ici, au Québec, lors des émeutes de Québec en 2001, il n’a jamais eu autant de problèmes, car nos forces de l’ordre respectent la présomption d’innocence contrairement aux policiers belliqueux de Toronto. Je démettrais illico l’ensemble du corps policier qui a participé au sommet du G20 et je leur retirerais leur citoyenneté canadienne. J’exigerais également la tête du premier ministre Harper pour avoir dépensé inutilement 1 milliard de dollars, de Jean Charest pour son inaction face au viol des libertés civiles de nos concitoyens, de Bill Blair, parce que jamais crétin irresponsable n’a eu autant de pouvoir et je souhaiterais la déportation de tous ceux qui demeurent attachés au fédéralisme canadien après l’exposition de ces faits, parce qu’ils souffrent visiblement d’un retard mental important.

jeudi 24 juin 2010

La St-Jean, kossé ça donne?

La belle génération de la St-Jean aseptisée, exempte de mal de vivre, sans joies trop grandes, mais surtout sans peines. Le son de la fierté d’être québécois, sénégalais, français, voire belge, un spectacle avec une grosse fleur de lys, plus grosse que celle de l’année passée! Des gens, plein de gens qui écoutent la musique d’ici, celle d’ailleurs, tout en brandissant un fleurdelisée à gauche, à droite et en ouvrant la bouche, pour crier, mais pas trop, nous ne sommes pas au hockey. Écoutons donc le grand Gerry interprété par un Jonas pas trop senti, suivi de la musique de Marie-Mai et de celle d'autres des autres avec « tu sens la Vibe ». Je me sens de plus en plus québécois!

Il me semble que pourtant, j’ai comme un arrière-goût d’amertume; quelque part, j’ai de la peine, parce que la St-Jean d’aujourd’hui n’a rien à voir avec ce qu’elle représente pour moi. Si c’est ça la St-Jean, Ti-Poil doit se retourner dans sa tombe (au nombre de fois qu’il doit se retourner ces temps-ci, Hydro devrait songer à lui brancher une génératrice). « On est peut-être quelque chose comme un grand peuple! » et ben non René, je suis désolé, je pense que c’est Duplessis qui avait raison : « Peuple épais et ben reste épais ». Finalement, Durham pensait qu’il fallait nous assimiler, mais c’est faux, nous avons notre autonomie : on est très capable de disparaître par nous-mêmes.

jeudi 10 juin 2010

Le jardin

Depuis maintenant plus d’une semaine, je me suis mis au jardinage à la vitesse grand « V ». En fait, tout a commencé bien innocemment par un intérêt soudain pour le jardinage, cet art viril [sic] qui se perd dans la nuit des temps. Montréalais jusque dans le fond de mon âme, les jardins communautaires sont pour moi le moyen idéal d’intégrer une activité agréable aux trépidations de la ville.

Il me semble répéter à tout le monde que je croise les mêmes choses : j’ai 10 sortes de tomates différentes, deux sortes de salades, de la bette à carde (en trois couleurs différentes), un plant de concombre, deux rangs d’oignons, de la coriandre, du shiso, un brin d’aneth, du basilic frisé à longue feuille, de la menthe, des plants de piment habanero ainsi que des piments bleus (à voir). C’est un petit jardin, mais c’est le mien et j’en suis fort heureux ainsi. Peut-être me laisserais-je aller jusqu’à vous montrer des photos un jour!

lundi 24 mai 2010

Paradigme de l’inertie

Hier matin, je prenais plaisir à paresser au lit ayant célébré jusqu’aux petites heures en bonne compagnie. Or, si ces moments de luxures se font de plus en plus rares, la conservation de l’énergie était aujourd’hui à l’ordre du jour.

Malgré la belle température, je bronzais mon visage avec mon écran d’ordinateur. Or, un tout petit rayon de soleil est venu frapper mon imaginaire, par ma fenêtre. J’ai senti l’envie de prendre crayon et papier pour aller écrire au parc Jarry. Naguère, ce fut ma source d’inspiration pour le roman que j’avais voulu rédiger lorsque je restais à proximité de la source de verdure. J’avais alors 20 ans. Aujourd’hui, je suis plus proche de ma trentaine que de ma vingtaine et pourtant, tout s’est déroulé si rapidement.

Au moins, maintenant, je sais ce que je veux faire de ma vie et les décisions prises à ce moment m’ont été bénéfiques. En sortant du métro, je cherchais pourquoi avoir voulu briser l’inertie, être sorti de mon petit confort et être revenu ici, dans un lieu longtemps oublié au fond de ma mémoire. La réponse est venue sans mot dire : pour constater!

Il a fait si beau!

mercredi 5 mai 2010

Badminton à quatre

Dimanche, 8h00 du matin. Je déjeune et je me sers une tasse de café bien fort pour amorcer ma journée en grand. Une dernière revue de ce qu’il faut que j’apporte : raquette, survêtement, cadenas, déodorant, gourde, puis je prends mon casque pour dévaler la piste cyclable à toute allure en direction du cégep Ahuntsic.

8h45 : J’arrive sur les lieux, le stationnement est désert, le support à vélo vide. Je contemple le ciel bleu et je respire l’air frais à plein poumon avant d’aller porter mon bagage à l’intérieur. Du haut du troisième étage, il y a une belle vue sur Montréal et un tour d’horizon m’apprend que mes compères ne sont pas encore arrivés. Lorsque je vais au loin voir si mon frère se retrouve bien, je remarque un homme au loin, proche des portes. Son regard scrute l’horizon, si silhouette se dessine courte et mince et son habillement contraste nettement avec le mien : cet homme a des vêtements longs, avec un manteau sombre et un béret assorti. Je me rapproche de lui d’un pas cadencé, mais calme. Je tends ma main dans les airs : Oscar me salue en retour. Plus que deux autres personnes avant de commencer.

Pendant que mon vieil acolyte (que je n’avais jamais vu à cette heure si matinale) se prépare, je vais jogger un peu autour pour voir si mon frère ne se présente pas à la mauvaise porte, étant donné qu’il s’agit là du plus grand cégep du Québec. Malgré mes indications, ce dernier tarde à poindre à l’horizon. Par contre, à mon retour, un vélo file à vive allure sa propriétaire me regarde avec un sourire : j’ouvre la paume de ma main qu’elle rencontre avec la sienne : Angélique vient d’arriver. Elle est en retard et nous allons rejoindre Oscar qui doit se réchauffer. Pas de nouvelles du frangin, mais à 9h30, lorsque nous décidons de commencer la partie, Benjamin s’avance vers nous avec mon ancien chandail CCCP (nous partageons le goût de la provocation, surtout lorsqu’elle est inutile). Notre groupe est complet, allons-y.

Quelques minutes passent pour l’échauffement des participants : nous nous réchauffons avec des coups de pratique, puis nous alternons les équipes afin de tenter d’équilibrer les forces, mais c’est assez difficile puisque notre niveau de maitrise du jeu varie grandement. Finalement, nous acceptons le fait que nos équipes ne seront jamais égales et je choisis de jouer un peu avec Oscar, car notre chimie d’équipe semblait plus forte. Benjamin et Angélique semblaient également capables de mieux agencer leurs habiletés respectives. Le niveau du jeu a augmenté durant une heure et demie pour après s’affaisser sous le poids de la fatigue des différents joueurs. Angélique et Oscar ont dû nous quitter à 11h30, le temps de disputer deux matchs en simple avec mon petit frère et voilà que midi arrive, le forçant retourner au bercail pour finir ses travaux scolaires.

Or, j’ai remarqué trois Asiatiques qui jouaient dans un terrain jouxtant le nôtre. Lors d’une interruption, je leur ai demandé si je pouvais me joindre à eux, ce à quoi ils ont acquiescé. Voilà trois joueurs de très bon niveau, beaucoup plus forts que moi. J’ai sué corps et âme pour disputer trois matchs avec eux, mais j’ai dû me rendre à l’évidence : ces trente minutes de jeu m’avaient plus épuisé que les autres deux heures et demie. Mon coéquipier et moi nous sommes inclinés 2-1 en 3.

En retournant à la maison, je ne pensais qu’à une chose : la prochaine joute entre amis qui aura lieu durant la prochaine fin de semaine!

dimanche 2 mai 2010

La feria du vélo

Je suis transi de sueur, j’arbore fièrement un sourire béat et mes jambes sont meurtries. Par cette journée venteuse, j’ai eu l’immense privilège de découvrir un aspect de la métropole qui m’avait échappé : aller travailler en vélo. J’aime beaucoup le vélo et j’ai eu le loisir d’en faire à foison dans ma vie, plus pour la plaisance que par nécessité.

Par défi comme par plaisir, je me suis accroché à l’idée d’utiliser mes deux roues comme moyen de déplacement entre mon travail et mon appartement. Mon cher coloc est une source d’inspiration à cet égard, lui qui se transporte partout sur l’île en patin à roues alignées. J’ai donc décidé de m’inspirer de son exemple. Pour ce faire, j’ai voulu m’installer un porte-bagage, moi qui avais toujours refusé de mettre des accessoires sur ma monture, jugeant que c’était un obstacle à la vitesse. On finit inexorablement par vieillir (ou par se rendre compte que les maux de dos sont moindres sans sac à dos)!

Ce n’est pourtant pas la première fois que j’emprunte les pistes cyclables pour aller travailler : au début de mon université, je travaillais dans une manufacture et j’y allais chaque jour en vélo. J’avais, à ce moment, des jambes d’acier (car en plus, je devais travailler debout pendant huit heures). J’ai déjà été travailler au Collège de Bois-de-Boulogne en vélo, mais encore là, c’est bien éloigné de la réalité du centre-ville, avec ses embouteillages de cyclistes. Une fois l’âge de seize ans atteint, ce n’est pas un moyen de transport très usité en banlieue. Exilé en ville, je trouve que le vélo se pose comme un moyen de transport fiable.

Une chose marquante pour moi aura été de voir des bouchons de circulation de cyclistes au centre-ville. Lors du retour à la maison, nous avions une énergie collective qui était palpable en montant la côte proche de Sherbrooke. La foule à deux roues soufflait collectivement et les muscles des jambes des cyclistes se gonflaient de manière rythmée. Une belle expérience que d’avoir l’occasion de vivre ça, j’ai bien hâte de recommencer!

mardi 27 avril 2010

C'est dans le mois de mai

Musique folklorique que j'ai en tête:

C'est dans le mois de mai, en montant la rivière
C'est dans le mois de mai, que les filles sont belles
Que les filles sont belles oh gai, que les filles sont belles.

Et que tous les amants, en montant la rivière
Et que tous les amants, y changent leurs maîtresses
Y changent leurs maîtresses oh gai, y changent leurs maîtresses.

Mais moi je ne changerai pas, en montant la rivière
Mais moi je ne changerai pas car la mienne est trop belle
Car la mienne est trop belle oh gai, car la mienne est trop belle.

Elle a de beaux yeux bleus, en montant la rivière
Elle a de beaux yeux bleus, une bouche vermeille
Une bouche vermeille oh gai, une bouche vermeille.

Oh ! Qu'il me serait doux, en montant la rivière
Oh ! Qu'il me serait doux de dormir avec elle
De dormir avec elle oh gai, de dormir avec elle.

Dans un petit logis, en montant la rivière
Dans un petit logis, tout près d'une fontaine
Tout près d'une fontaine oh gai, tout près d'une fontaine.

Et où tous les matins, en montant la rivière
Et où tous les matins, la mariée se baigne
La mariée se baigne oh gai, la mariée se baigne.

C'est dans le mois de mai, en montant la rivière
C'est dans le mois de mai, que les filles sont belles.

jeudi 22 avril 2010

La vaisselle (fiction)

Aujourd’hui, à mon travail, j’ai voulu laver ma vaisselle. J’ai donc enduit l’éponge de la mixture savonneuse, puis on a tapé trois fois sur mon épaule droite. Surpris, je me retrouve nez à nez avec une femme potelée, qui m’invective ainsi :«Spencer, que croyez-vous que vous faites ». Pour toute réponse, je lui offre mon plus beau sourire et je réponds candidement : « Je lave ma vaisselle, madame St-Louis ».

La fonctionnaire me pointe une fiche usée sur le mur adjacent au lavabo et elle me dit ses paroles préenregistrées : « Monsieur Spencer, il faut vous remplir la fiche : nom, prénom, matricule et heure d’utilisation ». Les conditions sont on ne peut plus claires, mais pourquoi diantre n’y ai-je pas pensé plus tôt? Je me retrouve à hausser les épaules et à tourner les paumes de ma main vers le haut, ayant vainement cherché dans mes poches un crayon pour obtempérer aux directives de la vieille chipie. La principale intéressée me dévisage et m’indique que si je désire obtenir un crayon, je dois remplir le formulaire de réquisition C-45 - matériel de bureau, l’adresser au chef de mon département par la voie du courrier interne et faxer une copie de ma demande à la secrétaire responsable de l’approvisionnement.

Exaspéré, je lui demande néanmoins poliment de me prêter le sien pour simplifier la chose, ce qu’elle me refuse catégoriquement. Je sens la colère me monter à la tête et je lâche l’assiette dans l’évier, ce qui ne manque pas de choquer la fonctionnaire atteinte de crétinisme profond. Je fronce les sourcils et je déclenche les hostilités de front :
- « As-tu eu une mauvaise soirée hier, Irène? Est-ce que tu as oublié ton formulaire de consentement pour faire des avances à Patrick? Vous n’avez pas pu coucher ensemble faute de notaire ouvert à onze heure du soir? »
- « Si tu continues comme ça Roch, c’est une motion de blâme que tu vas recevoir. »
- « Laisse-moi laver ma vaisselle en paix, si tu y tiens tant que ça à ton formulaire, je vais le remplir après »
- « Tu vas encore l’oublier, comme la fois où tu as fait des avances à ta patronne sans en demander l’autorisation préalable. Je n’aime pas ton attitude, tu essayes toujours de bousiller le système, des gens comme toi ne peuvent pas fonctionner en société ».
Irène avait dit un mot de trop et la colère qui me gagnait lentement s’est transformée en rage bouillante. J’ai pris l’affiche sur le mur et lentement, je l’ai aspergée de savon, puis j’ai lavé mon assiette avec. Subséquemment, en prenant grand soin de dévisager la belligérante, j’ai chiffonné l’affiche entre mes doigts et je l’ai lancée dans la poubelle. Ensuite, j’ai « échappé » mon assiette étincelante de propreté sur le carrelage de la cafétéria en mettant de l’emphase sur le mot « Oups ». J’ai cherché les yeux d’Irène et je lui ai dit d’un ton mielleux : « Chère Irène, il faudrait que tu remplisses un formulaire de consentement, le concierge doit nettoyer la cafétéria, il y a une assiette cassée ici. Je ne peux pas le faire moi-même où j’aurai un grief. Puisque tu as un crayon, je suppose que tu vas t’en occuper. Après tout, tu es si serviable »!

samedi 17 avril 2010

Relations sexuelles et tremblement de terre

Charmant article de la "science religieuse" qui établit une relation causale entre l'augmentation des relations sexuelles illicites et les tremblements de terre : même les prédicateurs américains n'arrivent pas à la cheville de Kazem Sedighi.

Amusons-nous un peu avec l'ayatollah Sedighi et la science :

Approche holistique : quels sont les autres facteurs qui favorisent les tremblements de terre : l'augmentation de la production de maïs biologique est-il un facteur plus plausible que le déplacement des plaques tectoniques par le réchauffement climatique?

Épistémologie : si on prend le mot pour établir sur quoi se base cette théorie, M. Sedighi se base sur... le mysticisme? Est-ce la même chose que j'utilise quand je joue à Heroes of Might and Magic pour découvrir quel sera le thème de la semaine prochaine?

Preuve empirique : à part le fait que la biographie de la vie personnelle de Richter ait mis en relation son amour du sismographe et sa vie tumultueuse, il n'y a pas d'autres sources qui font références aux propos de l'ayatollah.

Réfutabilité : de quelle manière peut-on réfuter cette théorie? L'ayatollah n'en donne pas la possibilité, la preuve est avant tout divine.

Fausse relation : est-ce que le libertinage est plus ou moins présent qu'il y entre 50 et 100 ou même plus de 2500 ans? J'aimerais souligner qu'au Québec, entre l'après-guerre et la révolution tranquille, là où la fréquentation des églises était à son paroxysme, d'autres institutions comme les bordels faisaient également salle comble. Plus loin, au temps de la Grèce Antique, n'est-il pas correct pour un homme marié de sodomiser son esclave?

Sophisme : Le sophisme est un raisonnement fallacieux qui pourrait avoir l'air exact... dans ce cas-ci, il s'agit de pure fabulation, probablement sans circonstances atténuantes (alcool, drogue, épisode rocambolesque de partie de jambes en l'air, écoute intensive de Jimmy Hendrix, etc.)

Un exemple de sophisme : les personnes qui demandent aux athées de prouver la non-existence de Dieu, alors que c'est à eux de faire la preuve qu'il existe.

A-t-on besoin d'en rajouter? Comme je suis un provocateur assumé, je renchéris avec une finale à la Mythbuster (qui ne traite malheureusement pas du sujet religieux) : "Busted"!

mercredi 14 avril 2010

Angoisse neurasthénique

Sous son ciel, chaque soir, arrive l’homme esquinté :
Il est fort, il est grand, il ouvre la porte et pose son séant.
Il est frêle, recroquevillé, la tête dans les mains,
L’homme, le chêne, est meurtri de partout.

Passif, il abrutit son esprit dans le spleen :
Il boit son dur labeur, il étiole sa misère dérobée,
Affalé sur son canapé, ses yeux vides fixent le néant.
Il se bat contre son inertie, un bourrèlement castrateur!

Si la veille son cœur battait d’allégresse,
C’est le temps d’une chanson, une balade heureuse,
Dans la complicité des sourires des amis en liesse.
Et demain il entamera une ritournelle sans être esseulé!

lundi 5 avril 2010

Une journée magnifique

Les belles journées du mois d’avril sont rares, mais le temps du dimanche de Pâques était plutôt exceptionnel : sur la terre de Caïn, à Bergeronnes, le mercure indiquait 20 degrés à l’ombre. Ma famille et moi, étendus sur la surface surplombant le fleuve, profitions du soleil pour pavoiser dans les herbes sèches, récemment découvertes de leur couverture de neige. Pourtant, à quelques mètres de ce petit bonheur d’occasion, on trouvait encore des buttes de neige sises à proximité des zones ombragées par les nombreux arbres qui parsèment le terrain. Le ruisseau dévalait la pente et les clapotis de l’eau venaient s’ajouter à l’air de détente qui régnait.

Il faut dire que la température perçue était bien au-delà de la plupart des journées d’été : mon oncle et mon père en ont même profité pour retirer leur chandail. Pour ma part, je me suis aventuré dans l’eau, à marée basse, pour aller me tremper les pieds, entre les krills, les champs de varechs, les buccins, les moules, pour ne nommer que quelques-unes des nombreuses formes de vie qui composent le magnifique estuaire du St-Laurent. J’avais peine à croire qu’au mois d’avril, j’avais les deux pieds dans l’eau et qu’il n’y avait plus trace de neige sur la grève, que les ruisseaux déversaient leur eau au fleuve dans un bruit fort et continu, interrompu seulement par de criards goélands. Enfin, les rayons de soleil dansaient sur l’eau, qui n’était guère plus chaude pour autant. Deux jours auparavant, la brume, la neige et le froid accompagnaient notre tardive arrivée.

Un petit bonheur, mais quel souvenir il laissera dans nos cœurs, nous qui avons eu la chance de nous réunir sous cette température clémente, qui réchauffa même ce lien qui nous unit!

mercredi 24 février 2010

L’identité québécoise du 21e siècle

Je désire vous partager, chers lecteurs, mes dernières réflexions concernant le fait d’être Québécois aujourd’hui. Qu’est-ce que l’archétype du citoyen du Québec qui sillonne nos rues? Je pense que finalement, la seule chose que je pourrai en conclure, c’est que ce portrait a changé depuis les deux dernières décennies.

Nous sommes partis, dans le contexte canadien, d’une perspective plutôt sociale-démocrate et nul ne peut contester que la société québécoise est aujourd’hui significativement plus néolibérale que par rapport à il y a 15 ans. Dans les valeurs qui priment (de par nos médias), on cherche aujourd’hui le confort individuel, la rationalisation des dépenses gouvernementales et on pourrait également sentir l’évasement de valeurs collectives (augmentation des droits de scolarité, morosité par rapport à la question de l’indépendance, diminution des services, privatisation, etc.)

Le Québec d’aujourd’hui est mou : en fait, il l’a toujours été. Connaissez-vous un seul pays qui a refusé son indépendance par deux fois? Avez-vous déjà senti le besoin, ailleurs dans le monde, de qualifier une révolution de « tranquille »? En fait, je suis à peu près certain que si j’organisais un coup d’État, la population n’opposerait qu’une résistance minime qui se résorberait dès que je lèverais le petit doigt.

Le Québec d’aujourd’hui est également pour le Statuquo : on ne parle pas de référendum, on ne retire pas les commissions scolaires, on ne nationalise pas l’hélioélectricité, on ne change pas le système de santé pour qu’il devienne fonctionnel, on n’axe pas dans les mesures préventives.

Par ailleurs, on laisse aujourd’hui plus de place aux entreprises privées, qui participent activement à l’acquisition d’un potentiel économique plus grand, on coupe dans les dépenses de services des fonctionnaires, on tente de mettre fin à la corruption grandissante de tout autre et on commence (enfin) à agir en environnement (dans une certaine mesure).

Je tends à croire qu’il s’agit d’une forme de régression de notre société : les jeunes sont cyniques et désabusés par rapport à la question identitaire, les nouveaux arrivants ne se sentent pas toujours accueillis chez nous, la qualité de nos services diminue, mais j’ose espérer qu’il ne s’agit que d’un processus d’équilibre duquel on pourra obtenir ce qui manque chez nous pour nous assurer un certain dynamisme social : un taux de natalité suffisant au maintien de la population.

samedi 20 février 2010

Festin de crêpes

Je me sens prolifique : j’ai si hâte de vous communiquer mon dernier festin que je prends même le risque de rester accroché à mon ordinateur pendant plus longtemps que je le souhaiterais.

J’ai été invité par le colocataire de mon amie Angélique à assister à une fête de la crêpe. Le concept n’est pas très complexe : on soupe ensemble en mangeant des crêpes de sarrasin avec du cidre. C’était d’ailleurs très amusant, parce que les seuls Québécois qui étaient présents à cette fête, c’était Angélique et moi! Nous avions donc un contingent de Français, majoritairement des étudiants de l’école Polytechnique, qui venaient retrouver les traditions de chez eux (et qui nous les partageaient).

Nous nous sommes retrouvés onze je crois, mais la mémoire est une faculté qui oublie. Il y avait un gars originaire de la Guyane française, Kendrick, Tristan, un étudiant quiet à la figure de gamin, Victor, un visage sympathique et coloré, Viet, un artiste déguisé en chimiste, Aurèle, qui n’en manquait pas une, Guylaine, qui aimait visiblement rire, Céline, avec son visage enfantin, Coline, qui semble d’une nature artistique et discrète, Thibaut, notre hôte flamboyant, Angélique, connue d’entre mille pour son rire tonitruant et moi, ben je n’ai pas besoin de me décrire, mais pour me faire plaisir : un rien provoquant, un tantinet baveux, mais néanmoins affable et surtout très peu véhément!

Bon, j’ai dû écrire ces noms de manière complètement abjecte, mais en prononçant, c’est un peu la même chose! Bref, tout ça pour dire qu’entre les débats perdurables entre le Québec et la France, les échanges de crêpe à la poêle (le concept est de lancer la crêpe dans la poêle de son partenaire et que lui fasse de même avec nous pour réussir le numéro… mémorable!), les blagues à la con, les « ça touche ou ça touche pas », il y avait beaucoup de plaisir dans l’air, de manière très simple d’ailleurs.

Et si nous avons englouti des tomates, des œufs, du jambon, des poivrons rouges, de la béchamel, du caramel salé (un coup de ce sacré Thibaut), une réduction de raisins, des bananes, du Nutella, nous avons surtout eu l’occasion de faire tout ça dans une ambiance sympatôche, comme dirait nos lointains cousins. Alors même si personne n’était « complètement grisé », qu’il n’y avait aucun fumeur, pas plus que d’hypernationalistes chantant la Marseillaise à tue-tête, il s’agissait tout de même des mêmes Français sympathiques dont on se fait généralement une idée! Merci pour cette belle soirée!

Le bonheur et le foie gras sont des synonymes

Les plus scientifiques d’entre vous savent peut-être que tout bonheur est en réalité une question de sécrétion d’hormones de plaisir (ocytocine, sérotonine, mélatonine, endorphine, etc.), mais qu’en est-il du foie gras? Produit-il l’hormone du plaisir louisvincentesque, ce plaisir extrême et difficile à définir qu’on obtient lorsqu’on mange de bonnes choses (ou lorsque l’on pense à manger de bonnes choses).

Pour le découvrir, j’ai décidé d’utiliser une partie d’un bien bon cadeau que j’ai reçu quelques êtres chers : un coupon-cadeau pour des cours de cuisine. Ayant tout de même une certaine expérience dans le domaine, je désirais tirer profit de l’enseignement qui me serait prodigué : aussi ais-je décidé de m’inscrire au cours de foie gras. Une partie de moi désirait ardemment apprendre à cuisiner avec ce noble morceau, une autre voulait venger l’affront que mon père (un des instigateurs de ce cadeau) m’avait fait en me parlant des cours de cuisine qu’il avait pris et dont il m’a si souvent fait l’éloge.

Je suis arrivé à l’atelier un peu comme on arrive à son lieu de travail la première fois : trop tôt, stressé et pas particulièrement zen. Le décor, bien qu’original (tout est en fait conçu avait des instruments de cuisines), me laissait présager une ambiance un peu plus hautaine que nécessaire. Un genre de chic postmoderne au look bien branché, mi-drôle, mi-hautain. Lorsque le décor est si important, il peut y avoir deux raisons : le décorateur a du goût et désire faire bénéficier le consommateur d’une ambiance particulière, mais néanmoins chaleureuse, ou encore, les cours sont de piètre qualité et l’on souhaite faire oublier cela en étant dans une ambiance tape-à-l’œil et clinquante.

Nous avons rencontré notre chef quelques minutes par après : un bonhomme costaud d’une trentaine d’années qui nous a parlé de ses multiples expériences de travail et qui a commencé son cours avec un accueil chaleureux. Le gaillard s’exprimait avec beaucoup d’éloquence et sa voix claironnante, entremêlée d’un franc-parler me permettait de croire que le cours serait des plus intéressant. Son sens de l’humour faisait également en sorte que nos « bévues » ne soient pas considérées comme des âneries sans nom. Seul le groupe me laissait présager le pire : 3 couples, une mère et sa fille ainsi qu’un autre jeune homme comme moi, le tout dans une ambiance très froide, chacun ne parlait qu’à celui qu’il connaissait et les autres nageaient dans le silence.

Nous avons commencé par faire un bonbon de foie gras : il s’agit morceau de foie gras enrobé d’une feuille de chou blanchie servie avec une vinaigrette balsamique tiède. Il faut comprendre que toutes les étapes de la confection des plats étaient dans un de ses fouillis étant donné le temps de préparation de certains éléments. Au bénéfice des lecteurs, je ne décrirai que brièvement les recettes et non leur préparation. C’était somme toute une entrée : l’intérêt de varier les types de cuisson, car les bonbons étaient cuits à la vapeur, enrobés de pellicule plastique. Ce plat était très bon et permettait entre autres de bien préserver le foie gras, étant donné qu’il était emballé.

Le plat de résistance était un raviole de foie gras (enrobé avec du prosciutto). Avec une farce constituée de raisins secs blonds, de canneberges, de lardons, d’oignon français, d’un peu d’ail, de thym et d’estragon, nous étions certains de la réussite de la chose. Ça sentait bon dans la cuisine, et nous mettions la farce, parcimonieusement, dans les ravioles en ayant l’eau à la bouche (ainsi que l’insatiable envie de manger tout le prosciutto).

Lorsque nous sommes passés à table, quel ne fut pas l’extase, la joie, le bonheur, l’euphorie, la félicité, la jouissance et l’orgasme de goûter la nourriture la plus exquise que je connaisse : j’aurais volontiers troqué cinq ans de ma vie pour pourvoir mon besoin d’en manger davantage. Simplement couvert d’une salade de roquette somme toute frugale, mais néanmoins aromatisée à l’huile de noisettes, au zeste de citron et au jus de ce dernier, avec des écorces de fromage parmesan généreusement râpées par mon auguste personne, on dirait que la perfection s’était métamorphosée en repas. J’ai poussé l’audace jusqu’à manger quatre petites ravioles et j’en avais déjà mangé trop : mon ventre ballonnant criait grâce et mes papilles, avides d’être stimulés pour obtenir un coït multiple qui n’en finirait plus, cherchaient vainement à convaincre mon lobe préfrontal d’amenuiser les réticences que j’avais à dévaliser mes collègues de table. Fort heureusement, j’avais eu l’idée géniale d’attendre en dernier pour me servir et d’ainsi « nettoyer » les denrées restantes. Je me suis calmé les nerfs grâce à un verre de vin de porto, qui était somme toute fort peu robuste en comparaison de ce plat, provoquant chez moi un tout petit regret : ne pas avoir choisi un vin de vendanges tardives. À ce moment, l’ambiance commence à changer et les gens se parlent. Je commence à déclamer des phrases en allemand à mon voisin de table, qui est d’origine germanique.

Par la suite, nous devions confectionner le désert : un beignet aux pommes et au foie gras poêlé. Il est inutile de le préciser, mais j’étais déjà rassasié. J’ai insisté pour faire la pâte tempura ainsi que pour poêler le foie gras (en utilisant la huitième merveille du monde : les ronds à induction). J’ai appris à mettre des croisillons dans les foies que nous avions : c’est simplement un élément de décoration, mais comme c’était beau! Par ailleurs, nous avions commencé la séance en réduisant une bouteille de vin de Sauternes à un seizième et en y ajoutant du miel. Nous avons eu le plaisir de napper le beignet de cette réduction, ce qui n’a pas été sans peine, étant donné l’état désinhibé du groupe qui commençait à devenir trop à l’aise, le vin aidant et les langues se dénouant. J’ai donc tenté de continuer à manger, ce qui dépassait la simple convenance. N’étant plus capable d’ingérer quoi que ce soit, j’ai tout de même poussé la note jusqu’à goûter à la demande spéciale d’une femme mariée à un homme d’origine française, dont toute la famille œuvre dans le domaine de la pâtisserie : elle désirait obtenir le secret du caramel salé. J’ai donc courageusement trempé un quignon de pain dans l’épaisse mixture pour goûter la finesse du sucre chauffée et mélangé à la crème 35 %. Je suis donc en ayant assimilé beaucoup (au propre comme au figuré) de l’expérience culinaire que je venais de vivre avec grand bonheur. Je ne pourrai probablement jamais assez remercier les personnes qui ont rendu cette chose possible, mais à Carl, Angélique et papa, je vous adore, il y a longtemps que je n’avais pas vécu une joie d’une telle ampleur!

mercredi 17 février 2010

Français aux JO: une ignominie

Je ne souhaite pas relancer le pérenne débat des deux solitudes, mais il semble à propos de parler du mépris le plus complet qu'affiche visiblement le Canada anglais à l'égard de la plus belle langue du monde : la nôtre! J'en veux pour preuve la fameuse histoire des jeux "bilingues"...

Les Jeux olympiques canadiens montrent à quel point l'utopie de Pierre-Elliot Trudeau est fausse et parle de la naïveté de l'homme, pour rester poli (or, puisque je me permets d'être vindicatif, je vous invite à utiliser le terme machiavélique). Voilà une autre preuve du bien-fondé de la souveraineté du Québec, car tant que nous serons au sein du giron canadien, nous ne saurons être respectés, encore moins être vus comme des égaux.

J’aimerais également attirer votre attention sur la manière dont on relate les Jeux olympiques : il y a au moins un blogueur qui n’ose même pas afficher sa fierté d’avoir vu le Canada écraser la Norvège 8-0 dans la langue de Molière, se reconnaissant probablement plus dans la francophobie que dans la francophonie du « plus meilleur pays du monde ».

Il est temps, plus que jamais, de renoncer à la facilité de l’assimilation et de se battre sans relâche pour assurer la survie de notre langue. Il est de notre devoir, en tant que citoyen, de s’assurer d’être respecté en tant que « nation » : si ce respect ne vient pas par les gestes de nos compatriotes anglophones, il devra émaner de par nos actions, pour nous assurer, au moins, de nous respecter (nous-mêmes).

Au risque de m’attirer les fougues de certains, j’aimerais ajouter que lorsque les Jeux olympiques ont eu lieu à Montréal, en 1976, ils étaient bilingues et même parfaitement bilingues. Que ceux qui pensent que le peuple Québécois est chialeur et pleurnichard se le tiennent pour dit : nous ne sommes que des pacifistes, car pour plusieurs autres peuples, cet odieux mépris serait vengé par des bombes, des meurtres et des guerres. Certains devraient songer à se souvenir de ce qu’est la vengeance et non pas simplement effacer leurs réflexions à ce sujet!

mercredi 20 janvier 2010

Débuter l'année du bon pied

Chers lecteurs,

Il semble que la quantité de billets que je puisse écrire par année soit limitée par ma faculté innée à procrastiner. Il y a longtemps que je ne prends plus le temps de déverser mes états d’âme devant mon écran : tant dans mon blogue que dans mes fichiers textes qui n’auront jamais d’autres lecteurs que votre humble serviteur. Je profite des quelques minutes qui me restent pour vous renseigner sur ma dernière résolution : redevenir en forme. Bref, je pense que toutes ces histoires de gastronomie conjuguées à des horaires impossibles et une fatigue cumulée n’ont fait perdre une partie de ma santé.

Alors à partir de maintenant, exercice obligatoire quatre soirs de semaine. Pour ne pas me brûler, j’y vais seulement une heure à la fois et j’ai diminué mes ambitions (j’avais pensé au début commencer à raison de six fois par semaine, mais voilà qui serait un peu exaspérant…) d’autant plus qu’il me semble avoir de meilleures choses à faire, particulièrement les vendredis et samedis soirs! Alors, pour le moment, les interminables gueuletons… ne se trouvent pas encore dans la liste des choses interdites, je pense que le changement serait trop drastique. Disons simplement que j’essaye de manger en faisant plus attention à ce qui se trouve dans mon assiette… et à tenter de dormir suffisamment. J’ai de la difficulté à aller me coucher, plus particulièrement depuis que j’ai découvert la série télévisée Malcolm in the Middle : il me semble que c’est un peu malsain.

Je découvre les bienfaits de faire de bonnes nuits de sommeil : ma productivité et mon énergie sont décuplées. Bien évidemment, je suis loin… très loin d’être assagi : mon corps ayant été particulièrement généreux avec moi durant plusieurs années, il est dur de changer des habitudes fermement ancrées en moi. L’important, il me semble, ce n’est d’avoir l’objectif d’être parfait (premièrement, on n’atteint jamais un tel objectif et deuxièmement les gens presque parfaits ont une tendance malsaine à me tomber sur les nerfs), mais bien de faire mon petit bout de chemin, un jour à la fois.

samedi 2 janvier 2010

Entrevue de la nouvelle année

Chers lecteurs,

Permettez-moi de vous souhaiter une bonne et heureuse année 2010. Nous recevons aujourd’hui en exclusivité le cher leader de la Corée du Nord : Kim Jong-Il, fils du chef éternel, Kim Il-Sung.

- M. Kim, votre état de santé a fait couler beaucoup d’encre dans les journaux du monde entier durant les deux dernières années, on a même été jusqu’à dire que vous étiez mort, qu’avez-vous à nous dire à ce sujet.

- Ma santé, tout comme la santé du pays, va très bien, j’ai d’ailleurs réussi à rentrer dans mon uniforme militaire que je portais en 1973, au moment de mes études en cinéma.

- Il faut bien préciser qu’avec tous les buffets que vous avez eus, les réceptions, les soirées mondaines et j’en passe, vous aviez réussi à développer un bedon assez protubérant. Enfin, passons! L’état lamentable de la Corée du Nord en matière de droits humains, de niveau de vie, de libertés individuelles ainsi que l’état d’autarcie que vous impose la politique de la Juche constituent un éventail de problèmes pour votre succession, puisque c’est ce qu’on discute présentement dans le RDM (reste du monde). Pensez-vous que votre fils Jong-un sera en mesure d’assurer la présidence du pays dans un tel contexte?

- Vous ne mâchez pas vos mots concernant l’état de mon pays, je vous rappelle que nous disposons d’une charte qui garantit la liberté d’expression à chaque individu.

- Ainsi que d’une kyrielle de camps de travail où vous allez emprisonner les criminels coréens ainsi que les trois dernières générations de leur famille, car l’un d’eux aura commis le crime d’écouter un film sud-coréen.

- Bon, ne perdons pas notre temps en conjectures inutiles : Jong-un est très apte à diriger une armée, mais je dois encore lui enseigner comment fonctionne l’Internet, puisque je suis un expert. C’est un garçon souriant et discipliné, mais je trouve qu’il est encore tôt pour parler de succession, je suis bel et bien vivant et en pleine forme.

- En terminant que pouvons-nous vous souhaiter pour 2010 (Juche 99)?

- Souhaitez-moi d’obtenir un consensus pour favoriser la paix dans le monde.