jeudi 31 juillet 2008

Un sinophile qui revêt les habits du démagogue

Apollinien ferait mieux de se recycler comme gérant chez Uniprix. On a toujours dit qu’on ne pouvait pas comparer des oranges et des bananes et il essaye de mettre la Chine aux côtés de l’Occident tout entier. En fait, il en vient à réduire l’Occident à un seul pays pour ce qui est de ses caractéristiques. De plus, il réutilise un discours usé à la corde des méfaits de notre civilisation : il parle de génocide, d’esclavage et compagnie et je parle de pollution.

L’Occident regroupe plus d’un milliard de personnes :
• 27 pays représentant 493 millions d’Européens font partie de l’Union européenne
• 24 pays représentant 241 millions d’Européens n’en font pas partie
• 303 millions d’Américains font partie de cette zone
• 33 millions de Canadiens joignent ses rangs

La Chine regroupe 1 321 851 888 personnes dans un seul pays qui, géographiquement, est plus petit que le Canada et qui rentre plus de trois fois dans la zone occidentale. La langue officielle de la Chine est le chinois mandarin, mais il y a 13 « dialectes », dont 7 majeurs, normalement intelligible l’un pour l’autre. En Europe, il y a plusieurs langues officielles et encore plus de dialectes. En Occident, l’esclavage est interdit et quasiment enrayé, en Chine…

Apollinien compare ici 8 crimes contre l’humanité étendus sur 500 années d’histoire pour l’Occident à trois « crimes » chinois qui datent tout au plus d’une cinquantaine d’années. Dans son hagiographie sinophile, Apollinien raconte que la Chine avait un millénaire d’avance sur le reste de l’humanité : or, si elle s’est fait vaincre par l’Occident par le colonialisme brut (passons alors sous silence l’annexion forcée du Tibet de Taïwan, de Hong-Kong en 221-216 av. J.-C. et les territoires disputés d’Askai Chin et le Trans-Karakoram), c’est peut-être parce qu’elle ne suivait pas le rythme.

Il y a des choses que l’on doit admettre : l’Occident a connu une phase d’industrialisation et elle a son rôle à jouer dans la pollution chinoise. L’Occident ne fait pas assez de transfert de technologie et elle aussi, a de grands problèmes environnementaux. D’ailleurs, elle fait miroiter sa « verdeur », mais exporte ses usines polluantes en Asie… il est donc à noter que j’aurais également pu jeter mon dévolu sur nous, les enquiquineurs!

Je ne l’ai pas fait pour une seule raison : parce que la Chine décide, son gouvernement est souverain, unitaire et peu stratifié. Avilie aux mirages oniriques du capitalisme sauvage qu’Apollinien décrivait, la Chine perd un peu de sa superbe qui s’envole dans un brouillard trouble régissant ses contrées : la Chine se développe anarchiquement (dans un système communisme, c’est assez exceptionnel) et si Apollinien trouve sa dictature éclairée, ce sera sans doute sous l’influence de l’opium.

Dernier petit commentaire : Apollinien nous dit qu’il voit l’arrivée des Jeux en Chine comme l’arrivée de cette civilisation dans le monde moderne. Une des conceptions datant de la Grèce Antique, d’où l’idée des Jeux d’ailleurs, est la démocratie, chose qu’on a l’air d’oublier dans une dictature. J’espère sincèrement qu’Apollinien, tout bon Occidental qu’il est, saura reconnaître que les athlètes canadiens devraient être les seuls maîtres de leurs pensées et de leurs gestes, puisque c’est une chose que de faire des Jeux, mais encore faut-il avoir eu l’assentiment de la population et je parie que les paysans chinois qui se sont fait déplacés sans compensation auraient déjà envoyé un mémoire et que la presse s’intéresserait à eux s’ils vivaient dans un régime démocratique. Je ne suis pas le plus ardent défenseur de la démocratie et encore moins de celle que nous avons, mais reste-t-il qu’elle nous donne un certain levier de pouvoir qui demeure une chose inconnue sous l’égide bienveillante du PCC.

Sans rancune vieux!

P.S. Je tiens tout de même à remercier Apollinien, parce qu'il m'a fait faire une recherche poussée pour mieux comprendre cette merveilleuse civilisation, son histoire riche et son patrimoine culturel étincelant à travers ma quête de preuve contre l'idolâtrie flagorneuse!

mercredi 30 juillet 2008

Hypocrisie olympienne

Je quitte un instant mon personnage imbu de sa personne et exhibitionniste de ses pensées pour vous parler de ce qui est à mon sens une conspiration contre le bon sens. D’ici quelques jours à peine auront lieu les jeux olympiques à Beijing, l’une des capitales les plus polluées du monde. Pour tenter de respecter les règles de sécurité en ce qui a trait à la qualité de l’air, le PCC a fait fermer, temporairement, des milliers d’usines à Beijing et dans les environs. De même, 90 % des véhicules pourraient être retirés des routes de la capitale.

Si je comprends bien, en plus d’une tentative fallacieuse de discussion avec le Tibet, la Chine se double d’une mesure environnementale drastique et provisoire qui sera relevée dès la fin des Jeux. Je trouve que c’est un complot contre le bon sens, qu’au nom des athlètes, un pays lève des restrictions pour les aider à mieux performer, mais laisse crever des milliers d’enfants et de vieillards (sans parler de tous ceux qui sont atteints de maladie pulmonaire, d’asthme et d’allergies) le reste du temps. Je passe sous silence l’évincement de milliers de pauvres gens pour la construction des installations olympiques.

Si j’ai bien compris, une fois les Jeux terminés, Pékin recommencera à asphyxier sa population, comptant sur les quelques lignes de métro inaugurées pour les Jeux afin de réduire les millions de tonnes de polluants qui cancérisent la population locale. J’appelle tous ceux qui sont contre ses mesures éhontées et hypocrites à ne pas ouvrir le téléviseur, à déchirer vos journaux et à boycotter, de toutes les manières possibles, les jeux les plus sales de l’Histoire.

dimanche 13 juillet 2008

Sept ans plus tard

Je me rappelle le début de ma technique en informatique au cégep comme si c’était hier : mon partenaire de casier s’appelait Vivien Goyon et il m’avait fait peur : strict, du genre « c’est ta responsabilité d’acheter un cadenas », je me demandais si les autres personnes de mon programme seraient plus affables. Au début, il y a eu Frédéric Faddoul, bonhomme haut en couleur, typiquement leader charismatique, qui se présentait à tout le monde : grand et très mince, il avait ce profil investigateur et artistique, il m’avait tout de suite montré son côté sympathique et m’avait rassuré en disant que Vivien aimait bien « brusquer un peu ». Puis il y eut Élie Bariche, dit Barichelli, le geek qui savait faire du Smilies en VB. Martin, l’homme intriguant que personne n’arrivait à saisir, se pointait souvent en retard et il était toujours très fatigué dans ses cours parce qu’il allait au Buzz Night Club, sans boire une goutte d’alcool. Edouard était l’archétype même du geek : un peu ventru, avec une chemise carreautée, il buvait du Pepsi comme de l’eau, affirmait que Zeus était le nom d’un serveur et codait de manière si complexe que c’est à se demander comment il s’y retrouvait.

Les deux autres sont arrivés plus tard : Christopher était un ami de l’école primaire à Fred : petit colosse baraqué, il aurait pu faire peur avec sa barbe jamais vraiment taillée s’il n’avait pas l’intension de faire rire ses interlocuteurs à chaque phrase qu’il disait. Toujours prêt à aider, il ne perdait jamais une occasion pour rappeler à notre conscience ses origines arméniennes dont nous aimions nous moquer de bon cœur. Il reste le très patriotique Laurent, personnage plus solitaire, farouchement indépendantiste, qui affectionnait particulièrement les chandails provocants, la langue française et les échecs dans les cours de mathématique. Hier, j’ai revu tout ce beau monde, en voici une petite description actualisée (je ne prétends pas que ce soit leur portrait craché, disons qu’il faut bien que je m’amuse un peu) :

Vivien : authentique patriote français déporté au Québec qui n’a ni l’accent français ni l’accent québécois : Vivien est unique et il le sera pour le reste de ses jours. Vivien affectionne surtout les bières françaises, le vin français et les filles françaises, mais quand vient le temps de recevoir, Vivien est un preneur universel. Il est connu pour son sens critique pour le moins particulier et reconnu comme étant l’amateur de vélo le plus farouche d’entre tous. Dans ses temps libres, il se pointe à ses cours de psychosocio et cumule les frais de retard à la bibliothèque de l’Université.

Fred : doté d’une créativité hors du commun, Fred effectue un retour aux sources en explorant son potentiel artistique. (cette partie du texte a été censurée). Fred est souvent jalousé pour son talent inné à séduire et à être charismatique. Il finit souvent par être l’instigateur de tous les événements, mais plus particulièrement les tournois de Smash.

Élie : Dans la mythologie, Élie veut dire « Fils de Dieu », mais pour nous tous, Élie signifie « vedge ». Élie représente parfaitement la paresse, l’excès, le laisser-faire et il s’assume parfaitement. Outre son petit côté maniaque (il a un trouble obsessif compulsif quand il se lave les mains), Élie est toujours prêt à boire, à fumer et à converser. Il a un fan-club de ses expressions les plus mémorables, détient le record des citations les plus pathétiques et certainement aussi, celui de l’être le plus doux du monde.

Martin : homme qui a renoué avec son côté latino, il garde également son côté geek fini de joueur de jeu de rôle. Buveur et fumeur social, Martin est agréable avec tout le monde et il a l’ego typiquement argentin : si on le lançait du haut de son ego, il en mourrait une fois tombé en bas. Martin a un don pour rechercher les relations amoureuses compliquées, pour être pris dans des dilemmes éthiques concernant ses amitiés, pour organiser des partys quand personne ne peut venir et pour toujours être occupé lorsque je tente de le rejoindre. Outre cela, c’est également le profil chic-type.

Édouard : il n’a pas changé d’un iota… en fait, sa masse corporelle a cumulé une nouvelle surcharge pondérale, mais outre cela, c’est toujours un passionné du détail, de la précision et plus spécifiquement aujourd’hui, de la recherche de la beauté, de l’esthétisme dans son travail. Fier, un peu dans la lune, il est toujours de bonne compagnie lors des soirées et il sait mettre un grain de sel, pas toujours nécessaire, mais néanmoins toujours spécial.

Christopher : Sourire, attitude sympathique et manque de tact le caractérisent parfaitement. Christ continu d’être susceptible, il attache encore de l’importance à la reconnaissance de ses qualités. Ces derniers temps, il s’est proposé à lui-même d’essayer d’adopter l’attitude de Casanova, ce qui n’est pas sans causer un vif déplaisir à la gent féminine. Christ est toujours partant quand il s’agit de célébrer et que l’occasion soit bonne ou mauvaise, il sera là et de bonne humeur. Il possède également un sens de l’esthétique douteux en critiquant mes chemises.

Laurent : Strait-edger un peu à droite, Sappy ne perd jamais une occasion de railler et de dérailler. Sur Facebook, il regarde tout, il analyse tout et il fait des commentaires partout. Farouchement antidrogue, Sappy est la police des partys et ses nombreuses conquêtes ont dû composer avec ses idées radicales et arrêtées. Sappy aime bien boire, rire et manger (c’est du moins ce que nous dit son ventre) et il est toujours chouette d’avoir l’occasion de discuter avec lui.

Moi : je ne me présente plus, je suis le type aux cheveux gris qui connait tout le monde, mais qui finalement ne voit personne. Dans ce contexte précis, je suis peut-être plus le rebelle contemplatif, qui analyse plus qu’il ne parle. Anciennement un fêtard de première, camarade des brosses mémorables et des shishas les plus vertes, je suis le type détendu, qui discute et qui cherche des prétextes pour retrouver sa solitude, pour pouvoir se plaindre d’être seul. Mégalomane, humaniste, personne aux idées et aux conceptions arrêtées, avec un sens de l’honneur qui n’est plus de ce siècle, je cherche la confrontation et les paradoxes. Je suis aussi l’oreille et la voix du réconfort!

samedi 12 juillet 2008

Le rêve

Un jeune homme part à l’aventure et il trouve une grotte mystique, cachée derrière une chute d’eau, là où autrefois les oracles prédisaient l’avenir dans le vol des oiseaux. Il décide de la franchir et arrive dans le monde intérieur de la terre, il décide d’aller à la rencontre des peuples qui habitent cette région inconnue.

Les galeries souterraines sont éclairées avec des quartz monumentaux qui les tapissent dans les murs transversaux. Le jeune homme finit par croiser un être vivant, ressemblant morphologiquement à un être humain, plus petit et grisâtre. Ce dernier lui fonce dessus à une vitesse vertigineuse et le héros a à peine le temps de se tasser que son assaillant se retrouve mort, cogné à une stalagmite trop imposante. Après avoir rencontré quelques êtres qui se montraient tout aussi féroces, le principal intéressé décide d’arpenter les lieux en se cachant, pour ne pas encourir les foudres des habitants de cette contrée.

Les lieux sont intéressants, de grands corridors débouchent sur une espèce de grand creux où les abords, à plusieurs étages, forment un genre de palais. Il y a plein de racoins, plusieurs types d’êtres vivants (certains ont des peaux qui sont plus colorées, ces créatures sont généralement plus grandes physiquement et elles sont équipées d’armes blanches).Toutes les créatures attaquent lorsqu’elles le voient, il se demande pourquoi.

Dans un racoin mal éclairé, il y a une espèce d’enclave qui semble avoir été à l’abandon depuis très longtemps. Dans un coin, notre héros trouve les des bandes datant de 200 ans contenant un vidéo de MacMillan523. Ce dernier était un authentique habitant de l’espace, un genre d’aventurier qui était parti rencontrer les peuples de la terre et qui leur avait posé une question concernant leur nourriture. Imaginez que la scène du vidéo est au même format qu’un RPG comme Final Fantasy. La réponse des intraterrestres ayant déplu à MacMillan523, ce dernier serait rentré dans une fureur immense et aurait fait un carnage démesuré, anéantissant quasiment la civilisation.

Finalement, le héros trouve un miroir et son reflet est celui qui orne les couloirs intraterrestres : il a le même visage que MacMillan523, peut-être est-ce un descendant.

N.B. Il s’agit d’un rêve que j’ai fait récemment, il va sans dire que le héros était personnifié par nul autre que moi-même, bien que mon apparence physique soit grandement modifiée.

mercredi 9 juillet 2008

Un matin plutôt spécial

Mes yeux sont encore clos, je sens une brise sur ma peau, qui caresse mes cheveux. Je respire à fond l’air qui entre dans la pièce et qui apporte des effluves qui ne me sont pas connus. Finalement, je sens un drap qui n’est pas le mien et la curiosité s’empare de moi : où suis-je? Je dilate mes narines pour capter toutes les odeurs qui pourraient s’aventurer autour de moi : je sens que je suis à côté d’une fille, son arôme ne me revient pas. Elle sent un peu l’eau de rose, je ne peux qu’ouvrir les yeux pour tenter de découvrir ce qui m’arrive, ma mémoire semblant oublier le passage du temps.

Je suis dans une chambre, les rayons de soleil dansent sur les murs bicolores : bleus dans le bas de la pièce, puis un rebord en bois taillé vient séparer le haut qui est blanc. Je distingue un bureau ancien, sur lequel traine une bouteille d’eau de fleur de rose, un livre de Jules Verne : « de la terre à la lune » et une plume d’oie qui jouxte une bouteille d’encre et une page qui n’est pas terminée.

En face de moi, je vois une commode qui doit contenir des vêtements. Il y a un petit miroir qui ne me permet que de voir le reflet du plafond; un ventilateur massif y trône. Autrement, mon regard se promène dans l’angle de la pièce où est une bibliothèque bien garnie. Finalement, mon regard ayant traversé la pièce vient se fixer sur un amoncellement de longs cheveux blonds ondulés qui dépasse des draps blancs. À la base trône une tête d’ange, au visage pur avec une peau blanche et délicate. Deux petits yeux, paupières fermées, exhibent des cils courts à proximité de sourcils affinés. Un petit nez fin se taille au milieu du visage que des taches de rousseur enjolivent. Des lèvres fines et roses semblent dire « embrasse-moi ».

J’ose me retourner vers la douce et je lui flatte délicatement la joue du revers de la main. À peine ai-je effleuré sa peau que ses petits yeux bleus se fixent sur moi et sur ses lèvres se dessine un sourire. Ses bras viennent chercher ma taille et son corps chaud se colle sur le mien avec un frisson de soulagement. Sa tête rejoint la mienne sur mon oreiller, nos nez se touchent, la belle ferme ses paupières avec confiance. Du coup, le stress qui m’habite depuis toujours devient un immense ruisseau calme : je n’ai aucune idée du jour, je ne sais pas où je me trouve, ni même l’heure qu’il est. Je contemple un instant le tableau qui m’est offert : je le grave dans ma mémoire avant de retourner me fermer les yeux et j'exulte un peu plus. Je l’embrasse : moment suave, délicieux. Pendant que mes lèvres sont collées sur les siennes, je sens un sourire en commissure : les pupilles pointent avec déférence vers le haut et le visage exhibe visiblement une invitation.

vendredi 4 juillet 2008

La kacha et le poulet à la Kiev de Tchekhov

La kacha est un plat russe traditionnel qui a été utilisé comme un met de cérémonie pour les mariages et les fêtes. Plus tard, Alexandre Nevsky en fait même une fête importante en 1239. Aujourd’hui, un proverbe russe nous dit qu’on ne peut nourrir un russe sans kacha. Tchekhov a eu l’idée de m’en faire goûter un qui n’était pas piqué des vers, en voici donc la critique.

Au premier regard, on voit que le résultat de la recette est une kacha visqueuse (il en existe trois types : liquide, visqueux et friable) qui oscille plus vers le friable. La base de la kacha est le grain, Tchekhov a choisi le sarrasin, un choix gouteux et nutritif. Cuit à base de bouillon de bœuf, on remarque le délice qu’elle inspire avec les champignons fins qui sont mis à contribution : morilles, pleurotes et chanterelles. Avec un peu de fenouil haché et de la crème sure, le mélange est très bon, quoique très nourrissant. Le seul point négatif de cette kacha est le sel : Tchekhov m’a candidement avoué l’avoir salée, ce qui la descend beaucoup par rapport à ce qu’il aurait pu être. Il faut également préciser que le camarade Tchekhov a fait une kacha relativement complexe : normalement, cette recette peut s’exécuter avec beaucoup moins d’ingrédients et dans un laps de temps de 20 minutes.

Mais allons-y pour la critique que Tchekhov désire ardemment : le poulet à la Kiev. Est-ce là une recette authentique de la Russie? En fait, ce poulet a été confectionné par un français, Nicolas François Appert (1749-1841) pour Elizabeth 1re de Russie. L’origine du nom « Poulet à la Kiev » pourrait provenir des restaurants de New York, qui, pour accommoder leur clientèle ukrainienne, aurait ainsi baptisé son poulet. Voilà donc un argument de taille pour convaincre le camarade Tchekhov que la cuisine française n’est pas que l’incarnation du mal.

Ici, comme pour la kacha, Tchekhov n’a pas été un puriste : il s’est permis de rajouter un élément discordant : des truffes. En fait, ce glouton a mis deux truffes pour une seule poitrine de poulet (qui était, par ailleurs, bien généreuse). Une des particularités du poulet à la Kiev est qu’il est garni de beurre aux herbes au milieu, ce qui n’était pas le cas avec le poulet d’Oscar, qui était fourré aux truffes.

La première chose que j’ai remarqué, c’est que ce poulet était recouvert de pois verts en conserve, ce qui détériorait énormément l’aspect visuel et qui constituait quasiment une offense visuelle à un met si prestigieux. J’en étais un peu offusqué, mais lorsque j’ai commencé à déguster le plat, j’ai compris : les pois ont absorbé le gras et ils devenaient très goûteux. Puis, vint le moment où j’ai mis ma fourchette à contribution pour défaire le poulet, dont la panure était assez molle, gracieuseté des pois, j’ai pu le sentir céder sans effort. Dans la bouche, j’ai senti que je perdais mon combat des chefs : un poulet qui n’est pas sec, goûteux, très goûteux même, avec une panure qui le rehausse et le beurre, que je soupçonne irlandais. Tout ça pour dire que le tout était fantastique : je mangeais avec allégresse, accompagné de la kacha, je sentais les truffes qui s’étaient propagées à travers la poitrine (normalement, on met une truffe pour quatre poitrines), l’onctuosité de la chair, un certain goût poivré et frais, ainsi que le gras, qui donne toute la saveur.

J’ai peu de mots à la bouche, sauf celui de la vengeance, de l’espoir de faire un meilleur plat, un repas plus grandiose, de devancer celui qui a (finalement) repris le flambeau de la cuisine. J’ai le goût de dire à Oscarovitch qu’il a finalement vaincu une partie de ses vieux démons et que je le vois dans le raffinement qu’il a mis à faire ce met divin. Il ne me reste qu’à remettre mon chapeau et de me mettre au travail.

Le bortsch du camarade Tchekov

Cher camarade,

j'ai l'honneur de vous apprendre que j'ai eu le plaisir de déguster votre bortsch et qu'il fut bien apprécié. Je vous demande donc d'accepter mes félicitations, vous avez largement dépassé votre ancien potage à la betterave, qui, bien honnêtement, ne payait pas de mine. J'aimerais tout de même détailler ma critique culinaire afin de vous fournir l'état de ma pensée.

Tout d'abord, je dois dire que j'ai trouvé que la présentation de votre soupe était appropriée, mais votre bouillon aurait pu être bonifié de quelques betteraves râpées afin de le rendre plus consistant. De plus, sans vouloir vous froisser, votre bouillon était chiche : même si je voyais le gras du boeuf, il vous faudrait faire cuire votre bouillon avec des os, afin de laisser la moelle le rendre plus gouteux. D'ailleurs, si vous aviez l'amabilité de casser votre eau avec une base de bouillon, cela aurait également contribué à augmenter l'arôme du potage.

Votre boeuf était bien cuit, vos betteraves et vos légumes étaient juste assez cuits, ce qui est très bien. Vous avez eu la bienveillante idée d'y ajouter de le fenouil, qui harmonise délicieusement votre soupe, bien que vous aillez un peu forcé la note. Par contre, il manquait un ingrédient typiquement russe dans votre soupe, une chose cruciale, vitale, essentielle : la crème aigre. C'est une erreur importante : il faut en mettre un peu dans la soupe (avec l'aneth ciselé) et laisser la balance à votre invité.

En somme, vous avez fait un bon travail, mais il faut tout de même vous dire que votre soupe n'avait pas beaucoup de personnalité : l'âme slave qui doit l'habiter semblait plutôt diluée. Vous auriez avantage à vous inspirer de ce proverbe russe : « Si tu as une bonne épouse et un Bortsch gras, alors tu peux t'estimer heureux ». Pour compenser cette remarque acerbe, laissez-moi terminer en vous citant Paul Bocuse, qui exprime une qualité indispensable à votre maitrise culinaire : « Il n'y a pas de bonne cuisine si au départ elle n'est pas faite par amitié pour celui ou celle à qui elle est destinée».

Votre ami dévoué,
Leonid Petrovitch Gaiev

jeudi 3 juillet 2008

Laval et Harmonium : trouvez l'erreur

Comme tout bon Québécois, je me suis dirigé à un spectacle de la fête nationale du Québec après une harassante journée de dix heures. Comble de bonheur, le spectacle de cette année était intéressant: un hommage à Harmonium. Comme 135 000 autres curieux (nous devions donc être 135 001 personnes), je me suis rendu au centre de la nature, un parc de l'est de l'île Jésus qui était anciennement une carrière, lieu de rassemblement du groupe « Les Voisins » et du dernier spectacle d'Harmonium en territoire québécois.


Ce que je n'ai pas encore précisé, chers lecteurs, c'est que je suis seul et je vais chercher des amis qui ne sont pas au courant que je serai là. Comme je l'ai précisé tout à l'heure, la foule est imposante et mes yeux de lynx découvrent avec stupeur que c'est difficile de se retrouver avec autant de personnes. Je m'aventure au moins une dizaine de minutes seul avant de retrouver mes amis... personnellement, je crois que la chance sourit aux audacieux, mais là, je pense que je suis un surhomme, détenteur du record du monde, celui qui a le GPS dans l'oeil... en fait, si ce n'était pas que ce sont (Ls-D et Gim, mes amis, qui m'avaient trouvé, je pourrais me le faire croire. Ls-D. est certainement la personne qui peut se vanter de voir ce que les autres ne voient pas : son oeil exercé peut trouver un ami dans une foule, même s'il ne s'attend pas à le voir, tout comme un problème dans un programme informatique d'ailleurs). Comme nous sommes en majorité hispanophone, le bilinguisme est de rigueur. Après un brin de conversation, le spectacle allait commencer.


La liste des artistes invités est impressionnante : Marco Calliari, Dan Bigras, Boom Desjardins, Yann Perreau, Grégory Charles et Marc Déry... bon d'accord, je connaissais Calliari pour son rôle dans Anonymus, Dan Bigras parce que c'est dur de ne pas le connaître, Boom Desjardins parce que tout le monde nous casse les oreilles avec lui et finalement Grégory Charles parce qu'il fait toujours tous les spectacles et qu'il signe avec Sony pour chanter en anglais..


Bref, le spectacle commence. Petit problème: les chansons ont été altérées pour ce qui est du rythme. Il y a deux ans, je pouvais me targuer de connaître mon Harmonium sur le bout de la langue : je l'écoutais tellement que je savais tous les textes par coeur. En fait, c'est assez difficile d'oublier, je me rappelais des textes, mais ils avaient altéré le rythme. Étant probablement le pire des puristes, cela nuisait hautement à l'image du sacré qui vient avec le seul groupe de magiciens du Québec. Par contre, l'essence des chansons étant les mêmes, il me venait en tête qu'un petit peu d'herbe du pays eu été agréable, fût-il de ma sobriété qui commence à dater.


Par la suite, je me rends compte que les gens autour de nous (notre groupe ayant grossi à 25 personnes avec plusieurs enfants) semblent s'en aller dès les premières notes de l'Heptade, ce qui, je trouve, casse beaucoup l'ambiance. Un petit garçon de six ans, Samuel, fait son apparition devant moi et il veut jouer avec moi. Ma nature profonde embarque donc au-delà du nationalisme exacerbé par l'événement et me voilà la tête sous une couverture à tâter les pieds de mes amis et à faire rire mon nouvel ami. Alors que les paroles d'Harmonium enchantent normalement mon cerveau, surtout grâce à cet extrait de « Comme un fou »:
[...]Dites-moi donc quoi faire
J'suis tombé sur terre
Au milieu d'un champ qu'on a r'couvert d'acier
Si j'pouvais m'prendre
Avec un peu d'chance
J'pourrais peut-être tomber quelque part de l'autre côté
Non, mon p'tit gars, non
C'est pas d'même qu'on apprend, non
T'as rien qu'à r'garder où les autres sont placés
Non, non, mon p'tit gars
Essaie pas d'parler, non
Sinon, va falloir penser à t'enfermer [...]


Le texte édifiant qui me fait normalement prendre une introspection n'a pas eu le même charme qu'à l'habitude, même si j'écoutais d'une oreille distraite les performances fantastiques de Gregory Charles et de Marco Calliari, Yann Perreault qui faussait et la voix pathétique de Boom Desjardins (et par moment de Dan Bigras, qui n'avait pas le ton juste). Bref, à prendre avec un certain soupçon de mélancolie, parce que finalement, c'est ambitieux pour des musiciens de vouloir recréer la perfection de l'Heptade, un peu plus de travail aurait été nécessaire. Ce spectacle aurait certainement pu être donné à des amateurs, mais pas à une foule de 135 000 personnes, la musique n'est pas assez accessible, il faut y être initié.


Je m'en voudrais de dire que le spectacle était raté, disons qu'il n'était simplement pas bien balancé. Quant à la finale (comme un sage), les feux d'artifice et le fait que nous avons trouvé des passes VIP ont certainement bien agrémenté notre soirée. J'aurais par contre apprécié voir ce spectacle dans une dimension un peu plus privée, voire plus politiquement engagée.


Le lendemain, Ls-D., fidèle à son habitude, a organisé une fête à la toute dernière minute. Il a téléphoné à tout le monde environ 1h30 avant de nous demander de le rejoindre chez lui, pour fêter la St-Jean-Baptiste autour d'un feu de joie. Bien assis dans la balançoire, nous discutions de tout et de rien, mais pas de politique ce soir-là. Nous avons passé un agréable moment entre initiés, avec en sus, mon petit-frère qui s'était joint à nous.


J'aimerais profité du moment pour lancer, d'une petite envolée lyrique, une ode au fleurdelysé et à la nation québécoise, qui, j'ai espoir, sera souveraine :


Ô mon drapeau, ma patrie, mon berceau, ma terre :

Je suis né sous ton sol glorieux, prêt à combattre

À parler français, une langue altière,

Désirant l'indépendance, toujours à débattre.


Je suis né sous le symbole du lys, mon fleuron

J'aspire à ta droiture, à ta noblesse divine.

Je me veux l'être le plus pur de l'escadron,

Perpétrant l'honneur de ma famille idoine.


Je rêve un jour de servir la noble cause :

De faire de mon drapeau un étendard du monde,

D'être un frère de la liberté, si je l'ose

De faire un nouveau pays, que la paix fonde.