dimanche 8 septembre 2013

Réflexion sur la charte des valeurs québécoises



Le gouvernement péquiste nous a fait l’honneur de vouloir faire une charte des valeurs québécoises. Si le concept en soi de vouloir baliser quelles sont les valeurs promues au Québec est sain, l’idée de parler des symboles religieux dans la fonction publique me semble pour le moins hasardeux.

Un gouvernement qui voudrait donner l’exemple retirerait d’abord le fameux crucifix de l’Assemblée nationale. Ce symbole ne date pas de la création du bâtiment, le concept de la séparation de l’état et de la religion étant à l’honneur dès le début de son fonctionnement. Le crucifix a été placé en 1936, par Maurice Duplessis, pour montrer que son gouvernement se voulait plus à l’écoute des principes catholiques.

Étant à priori pour le fait de laisser cette croix qui m’apparaissait bien innocente en place, mon ami Carl Gagnon a fait cheminer ma réflexion en me posant cette question : « Si, à la place du crucifix, il y avait eu un tableau de l’armée de Wolfe massacrant l’armée de Montcalm, trouverais-tu que la valeur historique de ce tableau permettrait qu’on le laisse dans l’Assemblée nationale? ». Après avoir entendu la question, mon air dubitatif m’a montré à quel point mon premier raisonnement ne tenait pas la route et j’ai donc changé mon fusil d’épaule : l’idée que nos décisions politiques seraient orientées par l’inféodation de notre nation par les Britanniques me répugne au point de vouloir en vomir.

Par rapport au port de symboles religieux, je laisse mes valeurs laïques au vestiaire pour baser ma réflexion par un document de la Constitution canadienne, la Charte canadienne des droits et des libertés. Dans le domaine juridique canadien, la suprématie de la charte canadienne prévaut (article 52 de la Charte constitutionnelle de 1982) sur les dispositions législatives. La Cour suprême du Canada est l’instance qui tranche par rapport à l’interprétation de cette dernière. Or, cette charte garantit la liberté de religieux et la jurisprudence invaliderait (probablement) automatiquement une charte des valeurs québécoises où les signes religieux ne seraient pas admissibles dans la fonction publique. Ainsi, tant que nous garantirons la liberté de conscience et de religion ainsi que la liberté d’expression dans un document constitutionnel, il me semble qu’on ne peut pas imposer « des valeurs québécoises » pour un peuple qui ne veut même pas retirer un maudit crucifix de son assemblée nationale.

Ultimement, les seules personnes qui gagneront à continuer à argumenter sur ce sujet seront les avocats.