vendredi 31 décembre 2010

La visite éclair au Lac

Il y a trois ans, j'avais formulé le souhait de me rendre visiter mon ami Denis au Lac St-Jean, mais les circonstances n'ont pas favorisé cette rencontre : par deux fois, la météo s'est déchaînée et les routes ont été impraticables dans le temps de noël, pour le reste, un mélange d'imprévus et de conflits d'horaire ont fait en sorte que ce projet, pourtant simple, n'est pas pu se concrétiser auparavant.

La distance qui sépare St-Gédéon des Bergeronnes n'est pas particulièrement impressionnante : il n'y a que 200 kilomètres de route qui nous séparent, mais la route en tant que telle est assez imprévisible : la réserve de la Sainte-Marguerite constitue un parcours sinueux, à travers une vallée à la température changeante. Par la suite, il faut traverser la ville de Saguenay, puis poursuivre la route par des chemins de campagne, où le vent peut s'avérer un obstacle pour le conducteur habitué aux villes.

La première partie du voyage relaxe le voyageur, tant les paysages sont parsemés de collines, de rivières, de chutes de glace et de vallées où le soleil se plait à créer des contrastes d'ombres et de lumières. La vallée de Sainte-Marguerite vaut son pesant d'or, car on s'y sent en communion avec la nature, dans cette contrée qu'on contemple à travers le chemin sinueux qui part de Sacré-Coeur pour se rendre à (feu) Chicoutimi, en passant par le village enchanteur de Sainte-Rose-du-Nord.

Puis, peu à peu, en passant par St-Fulgence, on entre dans la nouvelle ville de Saguenay, qui est un peu difficile à traverser, quand on ne s’y connait pas. Par chance, j’avais déjà eu l’occasion de faire du repérage, mon oncle nous ayant promenés en ville antérieurement. Un soleil de plomb terrassait les automobilistes du boulevard Talbot, qui avançait à la même vitesse que les automobilistes montréalais sur Décarie à l’heure de pointe.

La dernière étape de la route étant de se rendre à St-Gédéon, il suffisait de suivre une route de campagne, comme il en existe des centaines au Québec. J’ai par contre été surpris de rencontrer des villages d’une route, c’est-à-dire des habitations agglutinées autour de la 170.

Après un périple de trois heures, je me rends à l’adresse indiquée par mon ami Denis, authentique gars du Lac. Il m’accueille (un peu en retard), visiblement fatigué par les fêtes, son travail et sa rocambolesque vie sociale. En rattrapant quelques mois avec quelques bières, je me détends un peu de la longue route que j’ai faite. Nous sommes allés souper chez Gooffy, à Alma, pour prendre un repas traditionnel du Lac : la poutine à la sauce BBQ avec du Red Champagne. Après cette entrée en matière, nous sommes allés boire une bière au Crapaud, bar bien connu de la région. Malheureusement pour moi, c’était vide et j’ai eu un peu de difficulté à croire qu’on s’y bouscule les soirs d’affluence. Finalement, nous avons terminé la soirée en dégustant des bières à la microbrasserie de St-Gédéon, un endroit fort sympathique. Au milieu de nulle part, on trouve une petite place bien sympathique, où l’air est empli de houblon, de musique québécoise variée et où s’entrechoque un langage assorti d’un accent fort cordial. C’est en prenant une plaquette de dégustation que je découvre quatre sortes de bière. J’ai eu un coup de cœur pour la tante tricotante, la dernière et la plus forte de ces dernières. Voyant que mon ami commençait à canter, nous sommes retournés chez lui, question de nous coucher pour être prêts pour la pêche à la loche du lendemain.

Au petit matin (lire à 8h00, durant une période de congé), nous nous sommes levés dans une forme olympienne (un bon 20 minutes a été nécessaire pour nous extirper de nos lits respectifs) pour nous rendre chez le père de Denis, qui a été assez bon pour nous inviter à déjeuner. Puis, il me fallait prendre des habits qui me tiennent au chaud sur le Lac, alors j’ai eu droit à un genre de changement de style assez exceptionnel : mon manteau Kanuk ne suffirait pas à la tâche : j’ai revêtu un manteau d’armée, avec des salopettes assorties, des gants de cuir, des bottes doublées et même triplées, un cache-cou et un casque de motoneige. Il est à noter que je suis épouvantable pour attacher des casques. Lorsque je suis allé au centre Bell pour patiner avec les Canadiens, j’ai voulu donner l’exemple et j’ai apporté un casque… mais on a rapidement vu que je n’ai jamais revêtu un casque du genre! Bref, j’ai dû expliquer que j’étais un « montréalais un peu épais » et que je n’avais aucune idée comment je devais attacher la courroie.

Nous avons par la suite pris les motoneiges pour nous amener au milieu du Lac St-Jean. Voilà une quinzaine d’années que je n’avais pas monté sur l’une d’elles et ce fut là un moment très agréable. L’idée d’aller sur le Lac, un genre de désert de glace, me surprenait, moi qui ne connaissais rien de la pêche sur glace. Mais nous nous sommes rendus près des « trappes », un trou identifié par une branche d’arbre, puis nous avons piqué la glace. Attachée à une branche transversale, une corde d’une dizaine de mètres était attachée à une autre branche de bois, de 3 mètres. Cette dernière contenait les hameçons (des morceaux d’éperlans) et les loches qui ont bien voulu demeurer prises. Mon ami jubilait, il avait attrapé de gros poissons (dont un de 2,5kg).

En conduisant vers son deuxième trou, j’étais aux commandes de la motoneige et j’ai connu un accident heureusement peu fâcheux : en voulant tourner sur la glace, l’arrière de la motoneige dérape et les skis avant se placent sur la neige, ce qui donne un violent contrecoup, projetant mon ami sur la glace et mon rentrant le volant profondément dans les côtes. Comme nous roulions à basse vitesse, les conséquences sont relativement peu importantes, mais j’en ai été quitte pour une bonne explication, néophyte que je suis. Voilà une expérience qui fut bien marquante, d’autant plus que les « rots » de la glace sont assez uniques (il s’agit de l’air qui s’enfuit par les trous d’eau, ce qui donne un son rauque, comme si le lac rotait).

J’ai également eu l’occasion de croiser la grand-mère paternelle de mon ami, qui allait relever ses hameçons et qui semblait bien dynamique, même à sa 77e année. Nous sommes retournés et puis c’était la fin. J’ai quitté le Lac en me disant que j’avais eu la chance de vivre une belle expérience.

lundi 6 décembre 2010

Sous la neige

Montréal revêt son premier duvet de neige et la tempête ralentit le rythme effréné de la vie citadine. Aujourd’hui, j’ai comme envie de contempler le spectacle des lumières qui enjolivent le spectacle de la première rafale de neige de l’année. C’est là une belle occasion de profiter d’une marche pour se réconcilier avec le froid et l’hiver.

Je dois admettre avoir été préoccupé par autre chose et ne pas tout de suite avoir pu réaliser la beauté de la tempête, son calme apaisant et son charme, qui se dessine derrière les lumières qui nous permettent d’apprécier la poudrerie. Au son d’un carillon qui s’était pris dans le vent, j’ai eu l’occasion de m’émerveiller d’un bonheur fort simple, qui n’est pas sans rappeler l’Inukshuk, ce monticule de pierres utilisé par les peuples inuit et yupik pour guider la route des voyageurs. Cela est d’ailleurs un symbole pour lequel l’Ancre des Jeunes, l’organisme communautaire pour qui j’œuvre, avait donné la mention suivante : « Je suis passé avant toi. Tu es sur la bonne voie, aie confiance en toi et continue ta route ». Bref, un moment de calme dans le tumulte de la vie, qui nous embarque trop souvent à revers dans un tourbillon sans fin.

Je chausserai donc mes bottes dorénavant, en foulant du pied cette neige qui a, l’espace d’un instant, apaisé un spleen. Comme diraient les Beatles : « Let it be ».