jeudi 14 juin 2007

Le festin de Françoise

Depuis déjà quatre ans, Françoise et moi sommes liés par une tradition toute particulière: il nous faut, à nos fêtes respectives, faire un somptueux festin à l'autre. Françoise, cette année encore, ne s'est pas privée de faire honneur à la tradition, malgré que moi, avec cet éternel défaut de ne pas honorer la ponctualité, j'ai fait le sien quatre mois en retard. Elle s'est contentée du 3 juin.

Françoise est une cuisinière hors paire et elle serait même femme à marier si ce n'était de ces quelques défauts:

  • Premièrement elle est déjà prise;
  • Deuxièmement c'est une végétarienne;
  • Troisièmement, elle aime les barbus férus de physique;
  • Quatrièmement, je ne crois pas qu'elle veuille se marier (ce n'est pas vraiment un défaut, bien au contraire c'est plutôt un signe d'intelligence, mais il s'agit d'une contrainte);
  • Finalement, elle chante en anglais avec un accent british…

Je me rends donc chez elle à l'heure du souper où je suis reçu, comme à l'habitude, avec un grand sourire. Le temps d'enlever mes souliers et l'on passe à la cuisine, ou elle m'explique le repas, qui est toujours une surprise: le thème de la soirée est la cuisine alsacienne revisitée pour être végétarienne.

Les amuses gueules sont constitués de morceau de pain avec lesquels on peut goûter de l'excellente terrine de lapin (déjà fortement entamée, pour en tester la qualité, m'a-t-on assuré) et d'oie. On me dit qu'il s'agit des seules viandes qui seront au menu. Françoise, son copain et mon auguste personne lorgnons de l'œil la section des fromages en voyant également le camembert et le brie gorgonzola. Naturellement, comme je suis l'invité, je choisi toujours le premier ma tartinade et je m'arroge également le droit d'en prendre dans des proportions excluant toute forme de bienséance élémentaire. Après tout, je me lorsque je les reçois, je cuisine pour deux (en fait plus pour une dizaine de personne, mais disons qu'il y en a assez pour deux qui sont au jeûne depuis plusieurs mois) et lorsque je suis reçu, je m'entends d'être en droit, célibataire que je suis, de manger pour deux. Malgré ces excès, il y en a pour tout le monde, Françoise faisant également des tables très généreuses. Nous dégustons le tout en compagnie d'un verre de Risling, vin blanc (tout le souper tient au vin blanc) alsacien qui se marrie également fort bien en compagnie d'une bonne choucroute.

Une fois que nos estomacs ont terminés d'attaquer le premier service, on passe à la soupe, qui est une soupe froide niçoise (et alsacienne). C'est le seul met qui n'a pas de fromage. On me dit qu'il y a, par contre, une quantité indécente de beurre qui nourrit le riche bouillon. Si ma mémoire ne me fait pas défaut, il s'agissait d'une soupe aux poireaux et pomme de terres… en fait j'en suis quasiment certain. D'habitude, j'ai horreur des gaspachos et autres soupes que l'on mange froides, cette fois, j'ai bien aimé.

Par après, on trouvait une assiette d'asperges dans du brie fondu. Comme je ne raffole pas des asperges, je les mangent lentement, mais sachant le travail et la recherche derrière la préparation du met de mon hôte, je le fais sans faire aucun commentaire cette nourriture. Comme on dit, la parole est d'argent, mais le silence est d'or… c'était particulièrement vrai en cette occasion.

Après tous ces plats, il fallait bien faire un petit trou normand, que nous avons eu le plaisir de faire avec un peu de Bellini, si ma mémoire ne m'abuse pas. Passe ensuite le plat de résistance: une tarte aux artichauts et épinards avec son foisonnement de fromage ricotta. La recette de cette délicieuse tarte est même disponible en ligne: http://www.maison-kammerzell.com/maison-kammerzell-article60.html?id_recette=67

Nous dégustions le tout, il va sans dire, avec un Pinot Gris pas piqué des verres, plutôt rond et d'une durée en bouche plus grande que le Risling. Le tout était accompagné d'une salade pomme et carotte que j'avais moi-même amenée et qui, étonnamment, s'harmonisait très bien.

Nous commencions la dégustation d'un cidre tout spécial, très sucré, d'une couleur d'or, trouvaille de Françoise, juste avant de toucher au dessert: une succulente tarte au fromage. Bien qu'ayant tous très bien mangé, nous avons abusé du dessert avec autant d'aisance que si nous venions de nous mettre à table. J'avais dit, dans une entrée antérieure, que Kim était celle qui faisait les meilleures tartes au fromage… mais voilà qui m'amène à reconsidérer la question. Bien sucrée, onctueuse, se mangeant sans faim, sa tarte avait toute les qualités requises pour se figurer une place au palmarès des tartes aux fromages de ce monde.

Repus, fortement alcoolisés, nous étions en bon train de conversation quand je m'enquis de l'heure: le dernier métro allait passer sous peu et du reste, je souhaitais prendre un peu d'air pour dégriser à mon aise. Je pris donc congé de mon hôtesse, en lui donnant les honneurs attribuables à son génie culinaire, pensant qu'il me serait difficile de faire mieux pour sa propre fête, qui marquera cinq années de tradition. Nous avons deux types de cuisine très différents l'un de l'autre, mais les deux viennent du cœur, ce qui donne à nourrir beaucoup plus que le corps. Il me reste que je devrai donner beaucoup d'amour pour hausser d'un cran encore la qualité des mets à sa fête, voilà de quoi me faire méditer encore longtemps.

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